Dans ce résumé législatif, tout changement d’importance depuis la dernière publication est indiqué en caractères gras.
Le 10 mai 2018, l’honorable Harjit Sajjan, ministre de la Défense nationale, a présenté à la Chambre des communes le projet de loi C-77, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et apportant des modifications connexes et corrélatives à d’autres lois 1. Après la deuxième lecture le 15 octobre 2018, le projet de loi a été renvoyé au Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes, qui l’a renvoyé le 3 décembre 2018 à la Chambre des communes accompagné de plusieurs amendements concernant principalement des corrections ou des clarifications au libellé qui ne modifiaient pas le contenu du projet de loi 2. Le projet de loi a franchi l’étape de la troisième lecture à la Chambre des communes le 28 février 2019. Il a été adopté par le Sénat sans amendement et a obtenu la sanction royale le 21 juin 2019. La plupart des dispositions de ce projet de loi entrent en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret 3.
L’un des objectifs importants du projet de loi est de conférer aux victimes d’infractions d’ordre militaire les droits qui ont été enchâssés dans le système de justice pénale civile par la Charte canadienne des droits des victimes en 2015 4. Le projet de loi C-77 reprend bon nombre des modifications proposées dans le projet de loi C-71, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et le Code criminel (titre abrégé : Loi sur les droits des victimes au sein du système de justice militaire), qui est mort au Feuilleton lorsque le Parlement a été dissous en août 2015 en vue des 42e élections générales 5.
Le projet de loi C-77 ajoute à la Loi sur la défense nationale (LDN) une nouvelle section intitulée « Déclaration des droits des victimes » (DDV), qui prévoit que les victimes des infractions d’ordre militaire ont un droit à l’information, un droit à la protection, un droit de participation et un droit au dédommagement qui sont essentiellement identiques à ceux accordés aux victimes par la Charte canadienne des droits des victimes. L’infraction d’ordre militaire est définie comme étant une infraction à la LDN (autre qu’un manquement d’ordre militaire), au Code criminel 6 ou à une autre loi fédérale qui est commise par un justiciable du Code de discipline militaire (CDM) 7.
Le projet de loi C-77 apporte également une série de changements procéduraux au CDM qui ont trait, pour la plupart, à la mise en œuvre de la DDV. Il remplace l’expression « procès sommaire » dans la LDN par l’expression « audience sommaire » et circonscrit l’application du nouveau processus d’audience sommaire à une nouvelle catégorie de « manquements d’ordre militaire », qui consisteront en des infractions mineures prévues par règlement. La distinction entre les expressions « infraction d’ordre militaire » et « manquement d’ordre militaire » est importante, car les droits énoncés dans la DDV ne s’appliquent qu’aux victimes des infractions d’ordre militaire. Enfin, le projet de loi C-77 prévoit que l’un des objectifs de la détermination de la peine doit être la reconnaissance du tort causé aux victimes et à la collectivité, et ajoute un nouveau principe de détermination de la peine pour le système de justice militaire exigeant qu’une attention particulière soit accordée à la situation des contrevenants autochtones.
Il convient de noter que plusieurs articles d’un projet de loi antérieur, à savoir le projet de loi C-15, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d’autres lois en conséquence (titre abrégé : Loi visant à renforcer la justice militaire pour la défense du Canada) n’étaient pas en vigueur lorsque le projet de loi C-77 a été rédigé; ces articles n’ont force de loi que depuis le 1er septembre 2018 8. C’est pourquoi le libellé de ces articles, qui étaient censés devenir loi avec l’entrée en vigueur du projet de loi C-77, se trouve parmi les amendements connexes à la fin du projet de loi plutôt que dans le dispositif du projet de loi.
Conformément au paragraphe 18(3) de la Loi édictant la Charte canadienne des droits des victimes et modifiant certaines lois (titre abrégé : Loi sur la Charte des droits des victimes 9), la Charte canadienne des droits des victimes ne s’applique pas aux infractions d’ordre militaire qui font l’objet d’une enquête ou auxquelles il est donné suite sous le régime de la LDN. Dans son discours prononcé à la Chambre des communes en avril 2014, le ministre de la Justice d’alors, l’honorable Peter MacKay, a justifié cette exclusion en raison du caractère distinct du système de justice militaire du Canada :
[L]’application de la Charte des droits des victimes dans le contexte de la culture et du système de justice militaire, surtout dans le cas des procès sommaires, présente des difficultés particulières. Je pense notamment aux tribunaux disciplinaires qui sont administrés par la chaîne de commandement et qui se chargent de la très grande majorité des procédures du système de justice militaire canadien. La Charte des droits des victimes ne pourrait pas s’appliquer dans ce contexte immédiatement après avoir été adoptée par la Chambre 10.
À la même occasion, M. MacKay a déclaré que son gouvernement entendait présenter un autre projet de loi pour intégrer les droits prévus par la Charte canadienne des droits des victimes au système de justice militaire, et a salué le travail effectué en ce sens par le Cabinet du juge-avocat général (JAG) 11. Le projet de loi C-71, déposé lors de la 41e législature, était le fruit de ce travail, qui est également reflété dans le projet de loi C-77. Comme nous le verrons dans les sections suivantes, le projet de loi C-77 établit une nouvelle catégorie d’infractions prévues par règlement, soit les « manquements d’ordre militaire », et prévoit que la tenue d’audiences sommaires sera réservée aux affaires où seuls sont visés de tels manquements. Il s’ensuit que les victimes d’un manquement d’ordre militaire ne peuvent se prévaloir des mêmes droits que les victimes des infractions d’ordre militaire.
Le système de justice militaire est assujetti au même cadre constitutionnel que le système de justice pénale civile, avec lequel il partage de nombreux principes de justice sous-jacents 12. Il s’en distingue toutefois en ce qui a trait aux procédures, aux garanties procédurales, aux infractions et à la détermination de la peine. Selon Gilles Létourneau, ancien juge de la Cour d’appel de la cour martiale (CACM) du Canada, l’accusé qui fait face à la justice militaire est privé de certains droits accordés à celui qui fait face au système de justice pénale civile 13.
Le CDM, énoncé à la partie III de la LDN, est le fondement législatif du système de justice militaire. Il définit les personnes qui y sont assujetties, tant au Canada qu’à l’étranger 14; établit les infractions qui sont uniques au contexte militaire (manquement au devoir face à l’ennemi, absence sans permission, etc. 15), dont il précise la nature et les sanctions prévues pour celles-ci, ainsi qu’il incorpore au droit militaire toutes les infractions punissables en vertu du Code criminel ou d’une autre loi fédérale 16. Le CDM établit également l’autorité compétente en matière d’arrestation et de détention des personnes qui y sont assujetties, les tribunaux militaires, de même que les processus de révision et d’appel des verdicts et des sentences prononcés par ces tribunaux 17. Les tribunaux militaires ont compétence pour juger toutes les infractions d’ordre militaire, sauf certaines infractions commises au Canada, à savoir le meurtre, l’homicide involontaire et l’enlèvement d’enfants 18.
À l’heure actuelle, le système de justice militaire repose sur une structure de tribunaux à deux paliers : les cours martiales et les procès sommaires (que le projet de loi C-77 propose de changer pour un processus d’audiences sommaires) 19. La cour martiale et les procès sommaires diffèrent à plusieurs égards 20. Essentiellement, les procès sommaires servent à régler les infractions d’ordre militaire relativement mineures. Ce type de procès, qui est le plus courant, permet aux commandants militaires d’intervenir rapidement en cas de manquement en appliquant des mesures disciplinaires qui visent à maintenir l’efficacité et la discipline au niveau de l’unité. En revanche, la cour martiale sert à régler des infractions d’ordre militaire de nature plus grave. Il s’agit de cours formelles présidées par des juges militaires. Comparativement au procès sommaire, la cour martiale offre à l’accusé de plus amples garanties procédurales, comme le droit à un avocat. Les procédures relatives aux décisions rendues concernant les accusations devant les deux types de tribunaux militaires sont énoncées dans les Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes (ORFC), qui est un texte réglementaire pris en vertu de la LDN.
La Cour suprême du Canada a statué sur le bien-fondé du système de justice militaire à deux reprises, en 1980 21 et en 1992 22. Dans l’affaire R. c. Généreux, elle a écrit :
Le but d’un système de tribunaux militaires distinct est de permettre aux Forces armées de s’occuper des questions qui touchent directement à la discipline, à l’efficacité et au moral des troupes. La sécurité et le bien-être des Canadiens dépendent dans une large mesure de la volonté d’une armée, composée de femmes et d’hommes, de défendre le pays contre toute attaque et de leur empressement à le faire. Pour que les Forces armées soient prêtes à intervenir, les autorités militaires doivent être en mesure de faire respecter la discipline interne de manière efficace. Les manquements à la discipline militaire doivent être réprimés promptement et, dans bien des cas, punis plus durement que si les mêmes actes avaient été accomplis par un civil. Il s’ensuit que les Forces armées ont leur propre [C]ode de discipline militaire qui leur permet de répondre à leurs besoins particuliers en matière disciplinaire. En outre, des tribunaux militaires spéciaux, plutôt que les tribunaux ordinaires, se sont vu conférer le pouvoir de sanctionner les manquements au Code de discipline militaire. Le recours aux tribunaux criminels ordinaires, en règle générale, serait insuffisant pour satisfaire aux besoins particuliers des Forces armées sur le plan de la discipline. Il est donc nécessaire d’établir des tribunaux distincts chargés de faire respecter les normes spéciales de la discipline militaire 23.
Ce point de vue est partagé par le JAG qui souligne ce qui suit dans son rapport annuel de 2014-2015 :
La capacité des FAC (Forces armées canadiennes) de mener efficacement des opérations est directement liée à la capacité de sa chaîne de commandement d’inculquer et de maintenir la discipline. La nécessité particulière de la discipline dans les FAC est la raison d’être du système de justice militaire. Bien que l’entraînement et l’art du commandement soient essentiels au maintien de la discipline, la chaîne de commandement doit également disposer d’un mécanisme juridique lui permettant d’enquêter et de sanctionner les manquements disciplinaires nécessitant une réponse officielle, juste et rapide 24.
Le projet de loi C-77 énonce l’objet du CDM dans la LDN. Selon le nouveau paragraphe 55(1) de la LDN, le CDM a pour objet « de maintenir la discipline, l’efficacité et le moral des Forces canadiennes ».
À l’heure actuelle, les articles 203.1 à 203.4 de la LDN énoncent les objectifs essentiels de la détermination de la peine applicables aux tribunaux militaires et les divers principes de détermination de la peine à respecter par l’infliction de peines. Les paragraphes 63(21) et 63(23) du projet de loi C-77 modifient ces objectifs essentiels ainsi que certains de ces principes pour y incorporer la nouvelle terminologie, surtout, mais aussi pour reconnaître les torts causés à la victime et à la collectivité, pour favoriser le sens des responsabilités chez les contrevenants et pour accorder une attention particulière à la situation des contrevenants autochtones. Les objectifs essentiels de la détermination de la peine reprennent en termes identiques l’objet du CDM.
Le paragraphe 2(3) du projet de loi ajoute la définition du terme « victime » au paragraphe 2(1) de la LDN.
Selon cette nouvelle définition, une « victime » s’entend, pour l’application de la LDN, de tout particulier contre qui une infraction d’ordre militaire a ou aurait été perpétrée et qui a ou aurait subi des dommages – matériels, corporels ou moraux – ou des pertes économiques par suite de la perpétration ou prétendue perpétration de l’infraction. La définition vise également, outre la victime immédiate, les particuliers qui ont subi des dommages – matériels, corporels ou moraux – ou des pertes économiques par suite de la perpétration ou prétendue perpétration de l’infraction pour l’application des droits prévus par la nouvelle DDV, ainsi que des articles 202.201 (déclaration de la victime aux audiences, dans les cas d’inaptitude à subir le procès ou de non-responsabilité pour cause de troubles mentaux), 203.6 (déclaration de la victime aux audiences de détermination de la peine) et 203.7 (obligation de la cour martiale de s’enquérir auprès du procureur de la poursuite si la victime a été informée de la possibilité de rédiger une déclaration) de la LDN.
La définition proposée du terme « victime » est conforme aux définitions énoncées dans la Charte canadienne des droits des victimes et à l’article 2 du Code criminel, dans sa forme modifiée par suite de l’entrée en vigueur, en juillet 2015, de la Loi sur la Charte des droits des victimes. Dans toutes ces définitions, il n’est pas nécessaire qu’il y ait eu condamnation pour qu’une personne soit considérée comme étant une victime.
Aux termes du nouveau paragraphe 2(1.1) de la LDN (tel qu’il est modifié par le par. 2(4) et les dispositions de coordination énoncées aux par. 65(10) et 65(11) du projet de loi), les particuliers ci-après peuvent exercer, pour le compte de la victime, les droits que garantit la DDV si celle-ci est décédée ou incapable d’agir pour son propre compte pour des raisons autres qu’opérationnelles :
Cette nouvelle disposition s’applique aux droits garantis par la DDV de même qu’à ceux prévus à certains articles de la LDN qui visent l’obligation d’informer la victime de l’acceptation d’un plaidoyer (art. 189.1), la déclaration de la victime (art. 202.201, 203.6 et 203.7) et l’obligation d’envisager la possibilité de rendre une ordonnance de dédommagement à l’endroit du contrevenant (nouvel art. 203.81 prévu à l’al. 63(21)l) du projet de loi).
En vertu de cette nouvelle disposition, la victime qui est empêchée d’agir pour son propre compte pour des raisons opérationnelles peut demander qu’un membre des FAC, nommé par le chef d’état-major de la défense ou par tout officier autorisé par lui, agisse pour son compte.
Selon le projet de loi C-77, les mêmes personnes peuvent agir pour le compte d’une victime autant dans le contexte de la justice militaire que dans le système de justice pénale civile, hormis le membre des FAC nommé dans les cas où la victime est incapable d’agir en son propre nom pour des raisons opérationnelles.
Le nouveau paragraphe 2(1.2) de la LDN prévoit qu’un particulier ne peut exercer les droits conférés aux victimes s’il est inculpé ou déclaré coupable d’une infraction d’ordre militaire ou déclaré inapte à subir son procès ou non responsable pour cause de troubles mentaux à l’égard de l’infraction.
L’article 7 du projet de loi ajoute au CDM une nouvelle section intitulée « Déclaration des droits des victimes », qui confère aux victimes d’infractions d’ordre militaire certains droits accordés en 2015 par la Charte canadienne des droits des victimes à d’autres victimes d’actes criminels, à savoir le droit à l’information, le droit à la protection, le droit de participation et le droit au dédommagement.
Conformément au nouvel article 71.01 de la LDN, qui définit le terme « système de justice militaire » pour l’application de la DDV, les droits énoncés dans cette dernière ne s’appliquent qu’aux victimes d’infractions d’ordre militaire. Les victimes de manquements d’ordre militaire ne peuvent s’en prévaloir.
La DDV s’applique à l’égard de la victime dans ses rapports avec le système de justice militaire à partir du moment où une infraction d’ordre militaire est signalée jusqu’à la fin de la peine du contrevenant 25. Elle s’applique aussi dans les cas où un accusé qui est déclaré inapte à subir son procès ou non responsable pour cause de troubles mentaux relève, à l’égard de l’infraction, de la compétence d’une cour martiale ou d’une commission d’examen (lorsqu’il y a eu verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux ou d’inaptitude à subir un procès) (nouvel art. 71.14 de la LDN).
Pour exercer les droits prévus par la DDV, la victime doit être présente au Canada ou être un citoyen canadien ou un résident permanent du Canada au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés26 (nouveau par. 71.15(2) de la LDN). La victime d’une infraction d’ordre militaire commise à l’étranger qui ne répond pas à l’une de ces exigences ne peut donc se prévaloir des droits prévus par la DDV, peu importe si le procès se déroule au Canada ou dans le pays où l’infraction a été commise.
Enfin, tout comme dans la Charte canadienne des droits des victimes, les droits énoncés dans la DDV sont principalement de nature procédurale (droit de la victime de faire connaître son point de vue pendant les procédures et droit d’obtenir de l’information). Ces dispositions législatives ne confèrent pas aux victimes la qualité de partie à une procédure. De plus, les droits conférés doivent être exercés par les moyens prévus par la loi (nouveau par. 71.15(1) de la LDN). Autrement dit, ni la DDV ni la Charte canadienne des droits des victimes ne semble créer de droits autonomes exécutoires. Comme nous le verrons plus loin, la DDV prévoit un mécanisme d’examen des plaintes pour les victimes qui estiment que leurs droits n’ont pas été respectés, mais elle ne prévoit aucun mécanisme exécutoire de résolution des différends.
Le projet de loi C-77 prévoit la nomination d’un agent de liaison auprès de la victime qui en fait la demande. À moins que des raisons opérationnelles ne l’en empêchent, le commandant est responsable de nommer un agent de liaison chargé d’aider la victime à comprendre les procédures relatives aux enquêtes, aux accusations et aux condamnations et à obtenir les renseignements qu’elle a demandés et auxquels elle a droit (nouveau par. 71.16(3) de la LDN).
Dans la mesure du possible, le commandant nomme, à titre d’agent de liaison, l’officier ou le militaire du rang demandé par la victime. En cas d’absence ou d’empêchement de l’agent désigné, le commandant doit nommer un autre agent de liaison, à moins que des raisons opérationnelles ne l’en empêchent (nouveau par. 71.16(1) de la LDN).
Cette possibilité de nommer un agent de liaison, qui ne fait pas partie de la Charte canadienne des droits des victimes, s’explique par la nature particulière du système de justice militaire. Le document d’information du gouvernement pour le projet de loi indique ce qui suit :
Les infractions d’ordre militaire peuvent faire diverses victimes, y compris les militaires et leurs familles et les membres de la communauté civile en général. Pour bon nombre de ces personnes, le système de justice militaire peut être peu familier et possiblement intimidant. Par conséquent, pour faire en sorte que les victimes soient bien informées et en mesure d’exercer leurs droits, la loi proposée prévoit la nomination d’un agent de liaison avec les victimes lorsqu’une victime en fait la demande 27.
En vertu du nouvel article 71.17 de la LDN, les droits et procédures énoncés dans la DDV doivent être interprétés et appliqués de manière raisonnable dans les circonstances et d’une manière qui n’est pas susceptible de nuire à la bonne administration de la justice militaire ou de porter atteinte au pouvoir discrétionnaire ministériel ou exercé par toute personne ou tout organisme autorisé à libérer le contrevenant dans la collectivité. La DDV ne doit pas non plus être interprétée d’une manière qui pourrait mettre en danger la vie ou la sécurité d’une personne ou porter atteinte aux relations internationales, à la défense nationale ou à la sécurité nationale.
Le projet de loi exige que, dans la mesure du possible, les lois fédérales et les ordonnances, règles ou règlements qui en découlent soient interprétés et appliqués de manière compatible avec les droits énoncés dans la DDV (nouvel art. 71.18 de la LDN). Cela signifie que ces droits influeront sur l’interprétation et l’application d’autres lois. En cas d’incompatibilité avec une autre loi, les droits et processus prévus dans la DDV primeront, sauf si l’autre loi l’emporte du fait de son statut quasi constitutionnel. C’est le cas de la Déclaration canadienne des droits 28, de la Loi canadienne sur les droits de la personne 29, de la Loi sur les langues officielles 30, de la Loi sur l’accès à l’information 31, de la Loi sur la protection des renseignements personnels 32, de la Charte canadienne des droits des victimes 33 et des ordonnances, règles ou règlements qui en découlent (nouvel art. 71.19 de la LDN).
En outre, le fait qu’un particulier soit désigné en tant que victime à l’égard d’une infraction d’ordre militaire ne peut donner lieu à des conclusions défavorables à l’encontre de l’accusé (nouvel art. 71.2 de la LDN). Comme il a été précisé à la section 2.2, la définition du terme « victime » n’exige pas qu’un accusé soit déclaré coupable de l’infraction, puisque cela priverait la victime de ses droits aux étapes de l’enquête et de la poursuite. C’est pourquoi l’article 71.2 précise que la désignation d’un particulier en tant que victime (avant une déclaration de culpabilité) pour l’application de la DDV ne peut jouer à l’encontre de l’accusé dans le cadre d’une procédure. La DDV ne confère pas non plus à la victime, aux personnes agissant pour son compte ou encore à son agent de liaison la qualité de partie, d’intervenant ou d’observateur dans une procédure ni ne leur retire toute qualité autrement conférée (nouvel art. 71.23 de la LDN).
Enfin, la DDV ne peut pas être interprétée de manière à permettre à une personne d’entrer au Canada ou d’y séjourner au-delà de la période de séjour autorisée ou d’empêcher ou de retarder l’exécution d’une mesure de renvoi ou d’extradition (nouvel art. 71.21 de la LDN).
Les nouveaux articles 71.02 à 71.04 de la LDN disposent que la victime d’une infraction d’ordre militaire a le droit d’obtenir, sur demande, des renseignements sur les sujets suivants :
Les modifications proposées sont quasi identiques à celles prévues dans la Charte canadienne des droits des victimes, sauf pour ce qui est du droit d’obtenir des renseignements concernant tout examen prévu par la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC) en vue de la mise en liberté sous condition des délinquants fédéraux et, le cas échéant, le moment et les conditions de leur libération 34. Le nouvel alinéa 71.01b) de la LDN ne reconnaît pas aux victimes des infractions d’ordre militaire le droit d’obtenir des renseignements concernant l’exécution des peines (p. ex. les dates de libération sous condition) dans un pénitencier fédéral ou une prison provinciale. Toutefois, conformément à l’article 61 du projet de loi, certaines victimes pourront faire valoir leurs droits d’obtenir de tels renseignements en vertu des droits que leur garantit la LSCMLC.
Le nouvel article 71.05 de la LDN reconnaît que la victime a le droit à ce que sa sécurité soit prise en considération par les « autorités compétentes » du système de justice militaire. Le terme « autorités compétentes » n’est pas défini, mais on peut supposer qu’il vise la police militaire, les procureurs de la poursuite, les juges militaires, les commandants des prisons militaires et des casernes disciplinaires, et toute personne agissant sous la direction d’un tel commandement. La victime a aussi le droit à ce que des mesures raisonnables et nécessaires soient prises par les autorités compétentes afin de la protéger contre l’intimidation et les représailles (art. 71.06 de la LDN). Le projet de loi ne précise ni le type ni la portée de l’aide qui pourrait être accordée, pas plus que la Charte canadienne des droits des victimes.
La victime a aussi le droit à ce que sa vie privée soit prise en considération par les autorités compétentes du système de justice militaire (nouvel art. 71.07 de la LDN). De plus, elle a le droit de demander que son identité soit protégée si elle est plaignante à l’égard d’une infraction d’ordre militaire ou témoin dans des procédures relatives à une telle infraction (nouvel art. 71.08 de la LDN). Une telle demande peut être faite avant que l’affaire soit entendue par une cour martiale ou un juge pendant la procédure. Le projet de loi ne précise pas les mesures de confidentialité devant être prises pour protéger l’identité de la personne.
La victime a aussi le droit de demander des mesures visant à faciliter son témoignage (nouvel art. 71.09 de la LDN). Le projet de loi ne précise pas les mesures d’aide qui pourraient être autorisées, mais l’article 112.65 des ORFC prévoit que le juge peut ordonner qu’un témoignage soit recueilli par tout moyen de télécommunication permettant au témoin de rendre son témoignage hors de la salle d’audience ainsi qu’au témoin, à la cour, au procureur de la poursuite et à l’accusé de se voir et de communiquer simultanément 35. De plus, le juge peut autoriser l’accusé à comparaître par télévision en circuit fermé ou par tout autre moyen dans le cadre des procédures entourant les audiences relatives à un accusé déclaré inapte à subir son procès ou non responsable pour cause de troubles mentaux (voir le par. 202.201(13) de la LDN).
Le nouvel article 71.1 de la LDN donne à la victime le droit d’exprimer et de faire prendre en compte son point de vue dans le contexte des décisions des autorités compétentes qui touchent ses droits au titre de la DDV. La victime a aussi le droit de présenter une déclaration aux autorités compétentes du système de justice militaire et à ce que celle-ci soit prise en considération (nouvel art. 71.11 de la LDN). Ultimement, ces garanties n’offrent pas l’assurance de tel ou tel résultat, pas plus que dans le système de justice pénale civile.
Le paragraphe 203.6(1) de la LDN prévoit que, pour déterminer la peine à infliger au contrevenant ou pour décider si celui-ci doit être absous inconditionnellement, la cour martiale doit prendre en considération la déclaration de toute victime sur les préjudices physiques ou émotionnels qui lui ont été causés par la perpétration de l’infraction et les effets que l’infraction a exercés sur elle (al. 63(21)h) du projet de loi).
À l’instar des modifications apportées au Code criminel par suite de l’entrée en vigueur de la Loi sur la Charte canadienne des droits des victimes, le nouveau paragraphe 203.7(3) de la LDN autorise la victime, lorsqu’elle présente sa déclaration, à avoir avec elle une photographie d’elle-même prise avant la perpétration de l’infraction. Il autorise aussi la victime à présenter sa déclaration à l’extérieur de la salle d’audience pourvu que cela ne perturbe pas l’instance (al. 63(21)h) du projet de loi).
La victime peut également présenter sa déclaration par télévision en circuit fermé si les dispositions nécessaires sont prises pour que le contrevenant et la cour martiale puissent la regarder et si le contrevenant peut communiquer avec son avocat durant le visionnement (nouveau par. 203.7(4) à l’al. 63(21)h) du projet de loi).
Le nouveau paragraphe 203.7(5) précise que la cour martiale doit tenir compte des parties de la déclaration qui décrivent le préjudice physique ou émotionnel causé à la victime ou les dommages matériels ou pertes économiques subis par celle-ci à la suite de la perpétration de l’infraction reprochée, ainsi que de tout autre renseignement qu’elle juge pertinent pour la détermination de la peine (al. 63(21)h) du projet de loi).
On retrouve dans la LDN deux autres articles qui obligent la cour martiale à prendre en considération toute déclaration faite au nom d’une collectivité au sujet des répercussions que l’infraction a eues sur elle (nouvel art. 203.72 de la LDN) et toute déclaration faite au nom des FAC sur les répercussions militaires de l’infraction (nouvel art. 203.71 de la LDN, à l’al. 63(21)h) du projet de loi).
Le nouvel article 71.12 de la LDN donne à la victime le droit à ce que la prise d’une ordonnance de dédommagement contre le contrevenant soit envisagée par la cour martiale. Celle-ci n’est toutefois pas tenue de rendre une telle ordonnance, mais elle doit en envisager la possibilité.
Une disposition connexe à l’alinéa 63(21)l) du projet de loi ajoute l’article 203.81 à la LDN. Cette nouvelle disposition oblige la cour martiale à envisager la possibilité de rendre une ordonnance de dédommagement, que le contrevenant soit condamné ou absous inconditionnellement, pour faire pendant aux modifications apportées au Code criminel par la Loi sur la Charte canadienne des droits des victimes. La cour martiale doit demander au procureur de la poursuite, dès que possible après un verdict de culpabilité, mais avant d’imposer une peine ou de libérer le contrevenant, si la victime a eu l’occasion d’indiquer si elle demande un dédommagement (nouveau par. 203.81(2) de la LDN).
Si elle est convaincue que cela ne nuira pas à la bonne administration de la justice, la cour martiale peut ajourner la procédure pour permettre à la victime d’indiquer si elle réclame un dédommagement ou pour lui permettre d’établir ses pertes. Si la cour décide de ne pas rendre l’ordonnance demandée par la victime, elle doit motiver sa décision et faire inscrire les motifs au dossier de l’instance (nouveaux par. 203.81(3) et 203.81(5) de la LDN).
Conformément au nouvel article 203.901 de la LDN, les moyens financiers ou la capacité de payer du contrevenant n’empêchent pas le tribunal de rendre une ordonnance de dédommagement. Selon la jurisprudence en matière de dédommagement, bien que la capacité présente et future du contrevenant à payer ne soit pas déterminante, le tribunal doit néanmoins en tenir compte dans sa décision de rendre ou non une ordonnance de dédommagement. Le tribunal doit aussi tenir compte des répercussions du dédommagement sur la réinsertion sociale du contrevenant 36.
Lorsqu’il rend une ordonnance, le tribunal doit enjoindre au contrevenant de payer la totalité de la somme indiquée dans l’ordonnance au plus tard à la date qu’il précise ou, s’il l’estime indiqué, de la payer en versements échelonnés, selon le calendrier qui doit être joint à l’ordonnance (nouvel art. 203.902 de la LDN). Le dédommagement peut viser plusieurs personnes; dans ce cas, l’ordonnance doit préciser la somme qui sera versée à chacune et l’ordre de priorité des paiements (nouvel art. 203.91 de la LDN).
Si le contrevenant est en défaut de paiement, la victime peut faire enregistrer l’ordonnance de dédommagement au tribunal civil à titre de jugement exécutoire contre le contrevenant, ce qui permet à la victime de demander d’être dédommagée au moyen de mesures, comme la saisie ou la saisie-arrêt des fonds du contrevenant (nouveaux art. 71.13 et 203.92 de la LDN).
Le nouvel article 71.22 de la LDN énonce les recours qui sont à la disposition de la victime, qui peut déposer une plainte si elle s’estime lésée dans son droit par une autorité au sein du système de justice militaire. Des règles seront fixées par règlement pour encadrer l’examen des plaintes, le pouvoir de recommander la prise de mesures correctives et l’obligation d’informer les victimes des conclusions de l’organisme chargé de revoir les plaintes en question.
Les nouveaux articles 71.24 et 71.25 de la LDN précisent que la violation ou le déni d’un droit énoncé dans la DDV ne donne pas lieu, à son seul titre, au droit d’interjeter appel d’une décision ou d’une ordonnance prise dans le cadre d’une procédure en vertu de la DDV ou d’une cause d’action. Par ailleurs, il ne faut pas l’interpréter comme touchant toute autre cause d’action ou droit à des dommages-intérêts.
En vertu du nouvel article 147.6 de la LDN, si la victime craint qu’une personne assujettie au CDM cause des dommages à ses biens ou cause des dommages corporels ou moraux à elle-même, à son époux, à son conjoint de fait ou à ses enfants, elle peut déposer une dénonciation devant un juge militaire pour restreindre les mouvements ou les communications de la personne visée par l’ordonnance avec elle et ses proches.
La dénonciation peut aussi être déposée au nom de la victime par une autre personne. Le juge militaire peut alors, s’il est convaincu par la preuve que les craintes de la victime sont fondées sur des motifs raisonnables, ordonner à la personne assujettie au CDM et visée par la dénonciation de s’abstenir de communiquer, directement ou indirectement, avec la victime, l’époux de la victime, son enfant ou la personne qui vit avec la victime dans une relation conjugale depuis au moins un an.
Étant donné l’importance de protéger la victime de l’agresseur pendant les procédures judiciaires, un commandant sera autorisé à rendre une telle ordonnance lorsqu’aucun juge militaire ne sera disponible pour des raisons opérationnelles. Les décisions rendues par les commandants devront toutefois faire l’objet d’une révision par un juge militaire dans les meilleurs délais. La procédure relative au dépôt d’une telle dénonciation est prévue par règlement 37.
Les articles 158 à 159.9 de la LDN dictent les règles applicables suivant l’arrestation d’une personne sous le régime de la LDN 38. Aux termes du paragraphe 158(1), le prévenu doit être remis en liberté dès que possible à moins qu’il y ait des motifs raisonnables de croire que la détention avant procès est nécessaire compte tenu de la gravité de l’acte reproché ou de la nécessité d’établir l’identité du prévenu, de recueillir ou conserver des éléments de preuve, d’assurer sa comparution, de prévenir la perpétration ou la continuation d’une infraction ou, encore, d’assurer la sécurité du prévenu ou de toute autre personne. Le libellé actuel de l’alinéa 158(1)f) semble déjà permettre la prise en compte de la sécurité de la victime de l’infraction, étant donné qu’il précise « ou de toute autre personne ». Cependant, l’article 18 du projet de loi énonce cette idée explicitement en ajoutant les mots « de toute victime de l’infraction » devant « ou de toute autre personne ».
Lorsque le prévenu est détenu en attente d’un procès, l’officier chargé de réviser le bien-fondé de sa détention, l’officier réviseur 39, peut assortir la libération provisoire de conditions (p. ex. demeurer sous autorité militaire ou rester à l’intérieur d’une région précise) en conformité avec l’article 158.6 de la LDN. L’article 19 du projet de loi précise que l’officier réviseur qui ordonne la libération inconditionnelle ou sous condition du prévenu doit indiquer qu’il a pris en considération la sécurité de la victime dans son examen visant la mise en liberté provisoire et l’imposition de conditions (nouveau par. 158.6(1.1) de la LDN). La modification proposée à l’article 19 permet par ailleurs à la victime qui en fait la demande d’obtenir une copie de l’ordonnance de libération provisoire (nouveau par. 158.6(1.2) de la LDN).
Des modifications similaires sont aussi apportées à l’article 159.7 de la LDN (art. 23 du projet de loi). Par conséquent, pour décider s’il faut maintenir un prévenu en détention ou ordonner sa libération provisoire, le juge militaire doit tenir compte de la sécurité de la victime (nouveau par. 159.7(2)). Tout comme les modifications apportées au paragraphe 158.6(3) de la LDN, le nouveau paragraphe 159.7(3) exige du juge militaire qu’il remette une copie de l’ordonnance à la victime qui en fait la demande.
Lorsque la personne qui effectue une arrestation décide de maintenir le prévenu en détention, un officier réviseur est chargé d’évaluer le bien-fondé de la détention conformément à l’article 158.2 de la LDN. S’il détermine que le maintien en détention du prévenu n’est pas ou n’est plus justifié, il doit ordonner sa mise en liberté avec ou sans condition. L’officier réviseur peut imposer plusieurs conditions à la libération de la personne, dont celle de s’abstenir de communiquer avec tout témoin ou toute autre personne expressément nommée dans l’ordonnance (par. 158.6(1) de la LDN). Le projet de loi C-77 ajoute l’article 158.61 à la LDN. Celui-ci prévoit que l’officier réviseur peut imposer une condition similaire lorsqu’il décide d’ordonner le maintien en détention du prévenu. Comme c’est le cas lorsque la libération est subordonnée à une telle condition, l’interdiction s’applique à toute communication, qu’elle soit directe ou indirecte.
Aux termes de l’article 159 de la LDN, l’officier réviseur doit, dans les meilleurs délais, faire comparaître le prévenu devant un juge militaire pour une audition visant à déterminer s’il doit être maintenu en détention ou libéré. Selon l’article 159.1 de la LDN, le juge doit ordonner la mise en liberté du prévenu, sauf si l’avocat des FAC ou la personne désignée par l’officier réviseur lui fait valoir des motifs justifiant son maintien en détention. À l’instar de l’officier réviseur, le juge militaire qui ordonne la libération du prévenu peut imposer diverses conditions à sa libération (énoncées à l’art. 158.6 de la LDN), dont l’interdiction de communiquer avec toute personne précisée dans l’ordonnance. Le projet de loi C-77 ajoute l’article 159.31 à la LDN afin que le juge militaire puisse également ordonner au prévenu de s’abstenir de communiquer pendant son incarcération avec toute personne précisée dans l’ordonnance 40.
Selon le nouvel article 71.09 de la LDN, toute victime a le droit de demander des mesures visant à faciliter les témoignages lorsqu’elle comparaît comme témoin.
De plus, comme nous l’avons vu plus haut, la victime peut présenter sa déclaration par télévision en circuit fermé, pourvu que des dispositions soient prises pour que le contrevenant et la cour martiale puissent la visionner et que le contrevenant puisse communiquer avec son avocat pendant qu’il la visionne (nouveaux art. 183.2 et par. 203.7(4) de la LDN).
Le projet de loi C-77 modifie l’article 180 de la LDN, qui prévoit que les délibérations de la cour martiale se déroulent en principe en public et précise les circonstances dans lesquelles le juge militaire peut ordonner le huis clos. L’article modifié dispose que, comme les délibérations de la cour martiale, certaines autres procédures devant un juge militaire (p. ex. les demandes d’ordonnance de s’abstenir de communiquer) se déroulent en principe en public (nouveau par. 180(1) de la LDN) 41.
Le paragraphe 180(2) est modifié pour prévoir que le juge militaire peut ordonner le huis clos total ou partiel ou ordonner que le témoin témoigne derrière un écran ou tout autre dispositif, sur demande du procureur de la poursuite, d’un témoin ou de sa propre initiative (pas sur demande de l’accusé). La disposition en vigueur ne précise pas qui peut présenter la demande 42.
À l’heure actuelle, l’article 180 de la LDN n’énonce pas les facteurs devant être pris en compte pour déterminer s’il convient d’ordonner le huis clos. Le nouveau paragraphe 180(3) énumère les facteurs dont le juge militaire doit tenir compte pour décider si le huis clos est dans l’intérêt de la bonne administration de la justice militaire (incitation à dénoncer des infractions d’ordre militaire, sauvegarde des intérêts des témoins âgés de moins de 18 ans, etc.). La disposition confère aussi au juge militaire le pouvoir discrétionnaire de prendre en considération tout autre facteur non énuméré qu’il estime pertinent (par. 63(24) du projet de loi).
Cette disposition diffère à certains égards de la disposition correspondante du Code criminel, soit l’article 486, lequel permet non seulement le huis clos complet, mais aussi l’exclusion de certains membres du public de l’ensemble ou d’une partie de la procédure.
Comme à l’article 486 du Code criminel, la décision d’accorder ou non une ordonnance de huis clos ne peut donner lieu à des conclusions défavorables. Le juge militaire doit exposer les motifs de sa décision s’il rejette la demande de huis clos, et si l’accusation vise certaines infractions du Code criminel dont la plupart concernent des crimes de nature sexuelle ou la traite des personnes (nouveau par. 180(5) de la LDN) 43.
L’article 27 ajoute des dispositions à la LDN concernant la communication de dossiers de tiers dans les procédures devant un juge militaire. À l’heure actuelle, la LDN ne prévoit rien à cet égard. Les nouvelles dispositions sont presque identiques à celles du Code criminel édictées par la Loi sur la Charte des droits des victimes.
Les « dossiers de tiers » sont des dossiers contenant des renseignements personnels sur la victime ou d’autres témoins, au sujet desquels il existe une attente raisonnable en matière de protection de la vie privée, détenus par une personne autre que le procureur de la poursuite ou la défense 44. En font partie le dossier médical, psychiatrique ou thérapeutique, le dossier tenu par les services d’aide à l’enfance, les services sociaux ou les services de consultation, le dossier relatif aux antécédents professionnels, à l’adoption et aux études, ainsi que les journaux intimes. Le document contenant des renseignements personnels dont la communication est protégée par une loi fédérale ou une loi provinciale est aussi visé par la définition, alors que les dossiers produits par le responsable de l’enquête ou de la poursuite relativement à l’infraction d’ordre militaire ne le sont pas (nouvel art. 180.01 de la LDN).
Dans les poursuites pénales, le procureur de la poursuite est tenu de communiquer les dossiers d’enquête à l’accusé, mais les tiers en possession de dossiers n’ont pas cette obligation. Le Code criminel prévoit une procédure en deux étapes pour la communication de dossiers contenant des renseignements personnels : la première consiste à déterminer si les dossiers doivent être remis à la cour, et la seconde, à déterminer si le juge doit ordonner que les dossiers soient communiqués à l’accusé 45.
Bien que le droit à une défense pleine et entière soit, conformément à l’article 7 et à l’alinéa 11d) de la Charte canadienne des droits et libertés, un principe de base de justice fondamentale, dans le contexte de la communication de dossiers dans une cause concernant des infractions d’ordre sexuel, ce droit n’autorise pas automatiquement l’accusé à accéder aux renseignements contenus dans les dossiers privés des plaignants et des témoins. Les tribunaux évaluent la portée du droit à une défense pleine et entière en fonction des circonstances particulières de chaque cas et en cherchant à atteindre un équilibre entre ce droit et les droits à la vie privée et à l’égalité des plaignants et des témoins 46.
Le projet de loi C-77 instaure dans la LDN un régime similaire pour les cours martiales. Les principales différences entre les dispositions du Code criminel et celles du projet de loi C-77 concernant les dossiers des victimes sont exposées aux sections 2.6.2.1 à 2.6.2.4.
Le nouveau paragraphe 180.02(1) de la LDN énumère la liste des infractions (les infractions admissibles) pour lesquelles les dossiers se rapportant à un plaignant détenus par un tiers ne peuvent être communiqués à un accusé comparaissant devant la cour martiale que conformément à la procédure prévue aux nouveaux articles 180.03 à 180.08 de la LDN. Les infractions admissibles comprennent les infractions d’ordre sexuel à l’égard d’enfants, l’inceste, la prostitution, les actions indécentes, les agressions sexuelles et d’autres infractions d’ordre sexuel. Le projet de loi inclut également toutes les infractions historiques d’ordre sexuel énumérées dans le Code criminel qui auraient constitué des infractions admissibles si elles avaient été perpétrées à la date d’entrée en vigueur de la nouvelle définition ou après celle-ci. Le nouvel article 180.02 de la LDN est très semblable, sans pour autant être identique, à la disposition équivalente du Code criminel.
Les nouveaux paragraphes 180.02(2) et 180.02(3) de la LDN apportent les précisions suivantes :
La demande de communication de dossiers est formulée par écrit; elle permet de reconnaître le dossier et la personne qui l’a en sa possession ou sous son contrôle et elle donne les motifs étayant la demande de communication. L’accusé doit démontrer que le dossier est « vraisemblablement pertinent » quant à un point en litige ou à l’habileté d’un témoin à témoigner (nouveau par. 180.03(2) de la LDN). Le nouveau paragraphe 180.03(3) de la LDN énumère une série d’affirmations qui ne suffisent pas en soi à démontrer que le dossier est vraisemblablement pertinent, par exemple le fait que le dossier se rapporte à un traitement médical ou à une thérapie, à l’objet du litige ou à la crédibilité du témoin.
Le nouveau paragraphe 180.03(4) de la LDN exige que la demande de communication de dossiers de tiers soit signifiée au procureur de la poursuite, à la personne qui a le dossier en sa possession ou sous son contrôle, au plaignant, au témoin et à toute autre personne à laquelle, à la connaissance de l’accusé, le dossier se rapporte. La signification doit être faite au moins 14 jours avant l’audience de la demande. Le juge militaire conserve le pouvoir discrétionnaire d’autoriser que la demande soit faite dans un délai inférieur si cela sert l’intérêt de la justice militaire et il peut ordonner à tout moment que la demande soit signifiée à toute personne à laquelle, à son avis, le dossier se rapporte (nouveau par. 180.03(5) de la LDN).
L’audience visant à décider si le dossier devrait être communiqué au juge militaire se tient à huis clos (nouvel par. 180.04(1) de la LDN). Par audience « à huis clos », on entend une audience à laquelle toutes les parties sont présentes, mais dont le public est exclu 47.
La personne qui a le dossier en sa possession ou sous son contrôle, le plaignant ou le témoin et toute autre personne à laquelle le dossier se rapporte peuvent comparaître et présenter leurs arguments, sans toutefois être obligés de témoigner (nouveau par. 180.04(2) de la LDN). Le juge militaire est tenu d’aviser, dans les meilleurs délais, les personnes admises à comparaître de leur droit d’être représentées par un avocat (nouveau par. 180.04(3) de la LDN).
Le nouvel article 180.05 de la LDN précise les conditions et les facteurs que le juge militaire prend en ligne de compte pour décider si le dossier doit lui être communiqué pour qu’il l’examine. Le juge militaire peut ordonner la communication du dossier dans les circonstances suivantes :
Pour décider si le document doit être communiqué, le juge militaire est tenu, au titre du nouveau paragraphe 180.05(2), de prendre en considération les effets bénéfiques et préjudiciables qu’entraînera sa décision, d’une part, sur le droit de l’accusé à une défense pleine et entière et, d’autre part, sur le droit à la vie privée, à l’égalité et à la sécurité de toute autre personne à laquelle le dossier se rapporte. Le nouveau paragraphe énonce huit facteurs que le juge militaire doit prendre en ligne de compte, notamment la mesure dans laquelle le dossier est nécessaire pour permettre à l’accusé de présenter une défense et la question de savoir si sa communication reposerait sur une croyance ou un préjugé discriminatoire.
Si le juge militaire conclut que le dossier doit être communiqué pour qu’il l’examine lui-même, l’examen a lieu en l’absence des parties. Une audience à huis clos peut être tenue si le juge militaire l’estime utile pour décider si le dossier doit être communiqué à l’accusé (nouvel art. 180.06 de la LDN).
Le nouvel article 180.07 énonce les facteurs que le juge militaire prend en considération pour décider si le dossier, en tout ou en partie, doit être communiqué à l’accusé et dresse la liste des conditions dont l’ordonnance peut être assortie. Si le juge militaire est convaincu que le dossier est vraisemblablement pertinent quant à un point en litige ou à l’habileté d’un témoin à témoigner et que sa communication sert les intérêts de la justice militaire, il peut ordonner que le dossier soit communiqué à l’accusé (nouveau par. 180.07(1) de la LDN). Les facteurs à prendre en considération sont les mêmes que ceux énoncés au nouveau paragraphe 180.05(2) de la LDN, qui porte sur la communication ou non d’un dossier aux fins d’examen par le juge. Si le juge militaire ordonne que le dossier soit communiqué, il peut assortir l’ordonnance de communication de conditions visant à protéger l’intérêt de la justice militaire ainsi que les intérêts en matière de droit à la vie privée, d’égalité et de sécurité de la personne à laquelle le dossier se rapporte. La liste de conditions établie au paragraphe 180.07(3) de la LDN n’est pas exhaustive.
Si un dossier est communiqué à l’accusé, le juge militaire doit ordonner qu’une copie soit aussi remise au procureur de la poursuite, sauf si cette mesure est contraire aux intérêts de la justice militaire (nouveau par. 180.07(4) de la LDN). Pareils dossiers ne peuvent pas être utilisés devant une juridiction disciplinaire, criminelle, administrative ou civile (nouveau par. 180.07(5) de la LDN).
Selon le nouvel article 180.08 de la LDN, le juge militaire est tenu de motiver par écrit sa décision d’ordonner ou non la communication du rapport.
Le projet de loi C-77 ajoute à la LDN l’article 303, qui érige en infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire le fait de publier, de diffuser ou de transmettre, de quelque façon que ce soit :
L’article 28 du projet de loi ajoute des dispositions à la LDN afin d’autoriser certains témoins à recevoir l’appui d’une personne de confiance les accompagnant pendant qu’ils témoignent dans une procédure devant un juge militaire. Ces dispositions sont presque identiques aux dispositions correspondantes du Code criminel.
Aux termes de l’article 183.1 de la LDN, dans certains cas, une personne de confiance peut être présente aux côtés du témoin lorsqu’il témoigne. Si le témoin a moins de 18 ans ou est atteint d’une déficience physique ou mentale, le juge militaire doit rendre l’ordonnance prévue à cet article à la demande du procureur de la poursuite ou du témoin, sauf s’il est d’avis que cela nuirait à la bonne administration de la justice (nouveau par. 183.1(1) de la LDN).
Pour tous les autres témoins, le juge militaire peut autoriser la présence d’une personne de confiance à leurs côtés lors de leur témoignage s’il est d’avis que cela faciliterait l’obtention d’un récit complet et franc et serait par ailleurs dans l’intérêt de la bonne administration de la justice (nouveau par. 183.1(2) de la LDN). La demande visant à ce qu’une personne de confiance soit présente peut être formulée par le procureur de la poursuite ou le témoin. Le nouveau paragraphe 183.1(3) de la LDN précise les facteurs à considérer, notamment l’âge du témoin et la nécessité de l’ordonnance pour assurer la sécurité ou la protection du témoin.
Un témoin ne peut pas agir comme personne de confiance, sauf si le juge est d’avis que la bonne administration de la justice l’exige (nouveau par. 183.1(4) de la LDN). Le juge peut interdire toute communication entre la personne de confiance et le témoin pendant que celui-ci témoigne. La décision d’autoriser ou non la présence d’une personne de confiance ne peut donner lieu à des conclusions défavorables (nouveaux par. 183.1(5) et 183.1(6) de la LDN).
L’article 112.33 des ORFC prévoit qu’un témoin peut témoigner à l’extérieur de la salle d’audience ou derrière un écran à certaines conditions. Cet article l’autorise seulement pour certaines infractions, la plupart d’ordre sexuel, et si le plaignant ou le témoin est soit âgé de moins de 18 ans au moment du procès, soit atteint d’une déficience mentale ou physique. Dans pareils cas, si le juge estime qu’une telle ordonnance est nécessaire pour obtenir un récit complet et franc, il peut ordonner que le plaignant ou le témoin témoigne soit à l’extérieur de la salle d’audience en présence du procureur de la poursuite et de l’avocat de l’accusé, soit derrière un écran ou un dispositif qui permet au plaignant de ne pas voir l’accusé. L’ordonnance est accordée seulement si l’accusé et la cour peuvent voir et entendre le témoignage et si le procureur de la poursuite et l’avocat de l’accusé peuvent simultanément voir la cour et communiquer avec elle. L’accusé doit aussi être en mesure de communiquer avec son avocat pendant le témoignage.
Le nouvel article 183.2 de la LDN comprend des dispositions essentiellement équivalentes à celles de l’article 486.2 du Code criminel, qui porte sur les témoignages rendus à l’extérieur des salles d’audience ou derrière un écran ou un autre dispositif (art. 28 du projet de loi). Ces nouvelles dispositions remplacent celles de l’article 112.33 des ORFC.
Le nouvel article 183.2 de la LDN étend à d’autres personnes la possibilité de témoigner à l’extérieur de la salle d’audience ou derrière un écran ou un autre dispositif. Une telle ordonnance doit être rendue si elle est demandée par le procureur de la poursuite ou le témoin, à la condition que ce dernier soit âgé de moins de 18 ans ou qu’il ait de la difficulté à témoigner en raison d’une déficience mentale ou physique, sauf si le juge militaire est d’avis que cela nuirait à la bonne administration de la justice militaire (nouveau par. 183.2(1) de la LDN). À l’heure actuelle, le juge militaire peut rendre une telle ordonnance, mais il n’est pas tenu de le faire.
Le nouvel article permet au juge militaire de rendre une telle ordonnance à l’égard d’un témoin pour faciliter l’obtention d’un récit complet et franc des faits ou si, par ailleurs, l’ordonnance est dans l’intérêt de la bonne administration de la justice militaire (nouveau par. 183.2(2) de la LDN). Le nouveau paragraphe 183.2(3) précise les facteurs que le juge militaire prend en considération pour décider s’il doit rendre l’ordonnance. Il s’agit des mêmes facteurs que ceux prévus au nouvel article 183.1 à l’égard des personnes de confiance, mais deux facteurs y sont ajoutés : la nécessité de l’ordonnance pour protéger l’identité : 1) d’un agent d’infiltration ou d’une personne qui a agi, agit ou agira secrètement sous la direction d’un agent de la paix; 2) d’un témoin qui a des responsabilités liées à la sécurité nationale ou au renseignement. Le juge militaire peut ordonner l’audition d’un témoin de la manière établie au paragraphe 183.2(2) – à l’extérieur de la salle d’audience ou dernière un écran – pour déterminer s’il devrait accorder l’ordonnance prévue au nouveau paragraphe 183.2(2) (nouveau par. 183.2(4) de la LDN).
Le témoignage ne peut être donné à l’extérieur de la salle d’audience que si la possibilité est donnée à l’accusé, au juge militaire et au comité de la cour martiale générale, si une telle cour est convoquée, de visionner le témoignage et que si l’accusé peut communiquer avec son avocat pendant qu’il le visionne (nouveau paragraphe 183.2(5) de la LDN). La décision d’accorder ou non pareille ordonnance ne peut donner lieu à des conclusions défavorables (nouveau par. 183.2(6) de la LDN).
L’article 28 du projet de loi ajoute en outre des dispositions à la LDN afin d’interdire à l’accusé non représenté de procéder lui même au contre interrogatoire de certains témoins. Dans de tels cas, le juge militaire ordonne au directeur du service d’avocats de la défense de fournir les services d’un avocat pour qu’il procède au contre interrogatoire. Les dispositions sont pour l’essentiel les mêmes que celles prévues à l’article 486.3 du Code criminel. Les témoins sont classés en trois catégories :
Soulignons que les services d’un avocat de la défense sont d’ordinaire fournis gratuitement aux membres des FAC lorsqu’une accusation est déférée à l’autorité de renvoi. Cette façon de faire diffère du régime civil, où les services d’un avocat sont fournis seulement si l’accusé remplit certaines conditions, s’il a, par exemple, un faible revenu 48.
L’article 28 du projet de loi crée un nouveau type d’ordonnance judiciaire à laquelle le juge militaire peut avoir recours afin d’interdire la divulgation, dans le cadre d’une instance relative à une infraction d’ordre militaire, de tout renseignement qui permettrait d’établir l’identité d’un témoin si cela est dans l’intérêt de la bonne administration de la justice (nouvel art. 183.4 de la LDN). Les dispositions sont sensiblement les mêmes que celles de l’article 486.1 du Code criminel, édicté par la Loi sur la Charte canadienne des droits des victimes. Selon cette nouvelle mesure, l’identité d’un témoin ne serait pas divulguée à l’accusé, ni à son avocat ni au grand public.
Pour décider s’il doit rendre une ordonnance protégeant l’identité d’un témoin, le juge militaire prend en considération différents facteurs, notamment le droit de l’accusé à un procès public et équitable, la sécurité du témoin et l’intérêt de la société à encourager la dénonciation des infractions d’ordre militaire et la participation des victimes et des témoins au processus. Le juge militaire peut également prendre en considération tout autre facteur qu’il estime pertinent (nouveau par. 183.4(3) de la LDN).
Le juge militaire peut tenir une audience pour décider si l’ordonnance demandée doit être rendue, et cette audience peut être tenue à huis clos (nouveau par. 183.4(2) de la LDN). Le fait qu’une telle ordonnance soit ou non rendue ne peut donner lieu à des conclusions défavorables (nouveau par. 183.4(4) de la LDN).
Les nouveaux articles 183.5 et 183.6 de la LDN prévoient que des ordonnances de non-publication peuvent être rendues (voir le tableau 1 ci-dessous 49). Ce type d’ordonnance interdit la publication, la diffusion ou la communication par quelque moyen que ce soit de l’identité d’un plaignant ou d’un témoin (ou de renseignements pouvant mener à son identification). Les dispositions sont presque identiques à celles du Code criminel.
Infraction | Personnes visées par les renseignements | Nature obligatoire ou discrétionnaire de l’ordonnance | Disposition pertinente de la Loi sur la Défense nationale | Autres observations |
---|---|---|---|---|
Infractions précisées (principalement d’ordre sexuel) a | Témoins âgés d’au moins 18 ans | Discrétionnaire | Par. 183.5(1) | - |
Infractions précisées (principalement d’ordre sexuel) a | Témoins âgés de moins de 18 ans et victimes | Obligatoire si la demande est présentée par la victime, le procureur de la poursuite ou un témoin âgé de moins de 18 ans; discrétionnaire dans les autres cas | Par. 183.5(1) et 183.5(2) | Le juge militaire est tenu d’aviser les témoins de moins de 18 ans et les victimes de leur droit de demander l’ordonnance |
Infractions d’ordre militaire autres que les infractions précisées | Victimes âgées de moins de 18 ans | Obligatoire si la demande est présentée par la victime ou le procureur de la poursuite; discrétionnaire dans les autres cas | Par. 183.5(3) et 183.5(4) | Le juge militaire est tenu d’aviser les victimes âgées de moins de 18 ans de leur droit de demander l’ordonnance |
Pornographie juvénile (art. 163.1 du Code criminel) | Témoin âgé de moins de 18 ans ou personne faisant l’objet de la pornographie juvénile | Obligatoire | Par. 183.5(5) | - |
Toute infraction (dans les cas autres que ceux visés à l’art. 183.5) | Victime ou témoin de tout âge | Discrétionnaire | Par. 183.6(1) | Le juge militaire doit être d’avis que l’ordonnance est dans l’intérêt de la bonne administration de la justice militaire |
Infractions précisées liées au crime organisé, au terrorisme et à des entités étrangères | Personne associée au système de justice militaire b | Discrétionnaire | Par. 183.6(2) | Le juge militaire doit être d’avis que l’ordonnance est dans l’intérêt de la bonne administration de la justice militaire |
Notes :
Source : Tableau préparé par les auteures à partir des articles 183.5 et 183.6 du projet de loi C-77, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et apportant des modifications connexes et corrélatives à d’autres lois, 1re session, 42e législature (L.C. 2019, ch.15).
Le nouvel article 183.6 de la LDN régit les ordonnances de non publication dans les cas où le nouvel article 183.5 ne s’applique pas. La demande doit énoncer les motifs invoqués pour montrer que l’ordonnance servirait la bonne administration de la justice militaire (nouveau par. 183.6(6)). Le juge militaire peut tenir une audience pour décider s’il doit rendre l’ordonnance de non-publication en vertu du nouvel article 183.6; cette audience peut être tenue à huis clos (nouveau par. 183.6(7) de la LDN). Le nouveau paragraphe 183.6(8) énonce un certain nombre de facteurs que le juge militaire prend en considération pour décider s’il doit rendre l’ordonnance de non publication, comme le droit à un procès équitable et le risque de préjudice à une personne si son identité était révélée. Le juge peut assortir l’ordonnance de conditions (nouveau par. 183.6(9) de la LDN).
Contrairement à la disposition équivalente du Code criminel (art. 486.5), qui fixe les exigences procédurales (par écrit, notification, etc.), le nouveau paragraphe 183.6(5) de la LDN dispose que la procédure à suivre dans le système de justice militaire doit être établie par règlement.
Le nouvel article 183.7 de la LDN confère au juge militaire le pouvoir de rendre, sur demande du procureur de la poursuite ou d’un témoin ou de sa propre initiative, une ordonnance pour la sécurité d’un témoin, autre que celle visée à l’article 180 de la LDN (huis clos). Pour rendre une telle ordonnance, le juge doit être d’avis qu’elle est nécessaire pour assurer la sécurité du témoin et qu’elle est par ailleurs dans l’intérêt de la bonne administration de la justice militaire. Le juge militaire doit prendre en considération un certain nombre de facteurs, notamment l’âge du témoin et le droit à un procès public et équitable, de même que tout autre facteur qu’il estime pertinent.
À l’heure actuelle, l’article 191.1 de la LDN et diverses dispositions des ORFC prévoient la procédure afférente aux plaidoyers. L’article 191.1 est abrogé par l’article 30 du projet de loi. Le nouvel article 189.1 le remplace, et il traite de certaines questions qui sont actuellement régies par les ORFC. Le projet de loi C-77 rend la disposition sur les plaidoyers de culpabilité semblable à la disposition équivalente du Code criminel (art. 606); il existe quelques différences entre les deux dispositions, mais elles n’ont pour la plupart pas trait au fond.
Le nouveau paragraphe 189.1(1) de la LDN dispose que l’accusé peut, lorsqu’il est appelé à présenter un plaidoyer, s’avouer coupable, nier sa culpabilité ou inscrire tout autre plaidoyer prévu par règlement (par exemple non criminellement responsable) 50. Ce nouveau paragraphe permet l’acceptation du plaidoyer de culpabilité après le début du procès 51. Le nouveau paragraphe 189.1(2) de la LDN permet au juge militaire assigné à présider la cour martiale de recevoir le plaidoyer de culpabilité de l’accusé à l’égard de toute accusation et – s’il n’y a pas d’autres accusations devant la cour martiale où les plaidoyers de non-culpabilité ont été enregistrés – de déterminer la peine une fois la cour martiale convoquée, mais avant le début du procès. Contrairement au paragraphe 606(5) du Code criminel, qui autorise l’utilisation de la télévision en circuit fermé et la comparution de l’avocat au nom de l’accusé pour l’inscription du plaidoyer, le nouvel article 189.1 de la LDN interdit le recours à la télécomparution pour l’inscription d’un plaidoyer dans le système de justice militaire.
Le juge militaire ne peut accepter un plaidoyer de culpabilité que s’il est convaincu que les conditions ci-après sont remplies :
Cependant, l’omission du juge militaire de procéder à un examen approfondi pour vérifier que les conditions exposées ci-dessus sont remplies ne porte pas atteinte à la validité du plaidoyer (nouveau par. 189.1(4) de la LDN).
En cas de refus de plaider ou de non réponse de l’accusé, le plaidoyer inscrit est réputé être un plaidoyer de non culpabilité (nouveau par. 189.1(5) de la LDN) 53. Le juge militaire a le pouvoir discrétionnaire d’accorder à l’accusé un délai plus long pour plaider, pour préparer sa défense ou pour d’autres motifs (nouveau par. 189.1(6) de la LDN). Le juge militaire peut, avec le consentement du procureur de la poursuite, accepter le plaidoyer de culpabilité de l’accusé qui, tout en niant sa culpabilité à l’égard de l’infraction d’ordre militaire dont il est inculpé, s’avoue coupable d’une autre infraction d’ordre militaire se rapportant à la même affaire, et le juge doit alors déclarer l’accusé non coupable de l’autre infraction dont il est inculpé (nouveau par. 189.1(7) de la LDN) 54.
Si le juge militaire accepte un plaidoyer de culpabilité à l’égard d’une « infraction grave contre la personne », il est tenu de s’enquérir auprès du procureur de la poursuite si des mesures raisonnables ont été prises pour informer la victime de tout accord conclu entre le procureur et l’accusé (nouveau par. 189.1(8) de la LDN). Le nouveau paragraphe 189.1(12) de la LDN définit la notion d’« infraction grave contre la personne ». Cette définition vise un certain nombre d’infractions d’ordre sexuel prévues au Code criminel. Y sont incluses les infractions graves (soit celles punissables d’un emprisonnement maximal de cinq ans) ainsi qu’un certain nombre d’infractions visées par la LDN, si l’une ou l’autre des conditions suivantes sont remplies :
S’il s’agit d’une infraction grave autre qu’une infraction grave contre la personne, le juge est tenu, après avoir accepté le plaidoyer de culpabilité, de s’enquérir auprès du procureur de la poursuite si une victime a avisé ce dernier de son désir d’être informée de la conclusion de tout accord entre le procureur de la poursuite et l’accusé. Si un accord a été conclu, le juge est tenu de s’enquérir si des mesures raisonnables ont été prises pour informer la victime de l’accord (nouveau par. 189.1(9) de la LDN).
Si les nouveaux paragraphes 189.1(8) ou 189.1(9) de la LDN s’appliquent et que la victime n’a pas été informée de la conclusion de l’accord avant l’acceptation du plaidoyer de culpabilité, le procureur de la poursuite a l’obligation, dans les meilleurs délais, de prendre les mesures raisonnables pour ce faire et pour aviser la victime de l’acceptation du plaidoyer (nouveau par. 189.1(10) de la LDN). Toutefois, ni l’omission par le juge militaire de s’enquérir auprès du procureur de la poursuite ni l’omission par ce dernier de prendre des mesures raisonnables pour informer la victime de l’accord ne porte atteinte à la validité du plaidoyer (nouveau par. 189.9(11) de la LDN).
Le paragraphe 63(25) du projet de loi C-77 modifie l’article 215 de la LDN, disposition qui permet la suspension d’une peine d’emprisonnement ou de détention par la cour martiale ou la Cour d’appel de la cour martiale 56. Le projet de loi C-77 dispose qu’en cas de suspension de l’exécution de la peine, il doit être indiqué dans la décision que la cour martiale ou la Cour d’appel de la cour martiale, selon le cas, a pris en considération la sécurité de la victime de l’infraction (nouveau par. 215(1.1) de la LDN). En outre, une copie de la décision doit être remise à la victime qui en fait la demande (nouveau par. 215(1.2) de la LDN).
L’article 230 de la LDN énumère les motifs que les personnes assujetties au CDM peuvent invoquer pour interjeter appel, auprès de la Cour d’appel de la cour martiale, d’un verdict de culpabilité prononcé par une cour martiale. L’article 37 du projet de loi ajoute un motif d’appel permettant de contester la légalité de la décision de ne pas rendre l’ordonnance en vertu du paragraphe 180.05(1) de la LDN ou de rendre ou non l’ordonnance visée au nouveau paragraphe 180.07(1), qui ont toutes deux trait à la communication de dossiers de tiers. De façon similaire, l’article 38 du projet de loi modifie l’article 230.1 de la LDN pour donner à la poursuite le pouvoir d’interjeter appel de la décision du juge militaire de rendre les ordonnances visées à l’un ou l’autre de ces deux paragraphes.
À l’heure actuelle, comme nous l’avons déjà vu, les accusations portées dans le cadre du système de justice militaire sont traitées soit par procès sommaire, soit par procès devant une cour martiale. Les procès sommaires sont présidés par un commandant, son officier délégué ou un commandant supérieur. Ils portent d’ordinaire sur des infractions mineures et ils offrent moins de protections procédurales. Les cours martiales sont présidées par un juge militaire. Dans le cas des cours martiales générales, le juge militaire est adjoint de cinq membres des Forces armées canadiennes; ce comité joue un rôle semblable à celui du jury dans le système de justice pénale civile 57. L’article 25 du projet de loi modifie la section 5 du CDM pour y introduire une nouvelle catégorie de manquements d’ordre militaire, qui sont des contraventions de moindre gravité prévues par règlement. Il énonce aussi les règles relatives aux audiences sommaires sur les manquements d’ordre militaire.
Le projet de loi C-77 abroge les articles 162.1 et 162.2 de la LDN pour permettre à un accusé qui pourrait être jugé sommairement de choisir d’être jugé devant une cour martiale. Comme nous le verrons plus loin, puisque le projet de loi C-77 élimine la possibilité que les infractions d’ordre militaire fassent l’objet d’une audience sommaire, ces dispositions ne sont plus nécessaires.
L’article 24 du projet de loi remplace les articles 160 à 161.1 de la LDN. Il traite du dépôt et du renvoi d’accusations à l’égard d’infractions d’ordre militaire et de manquements d’ordre militaire. Nous y reviendrons plus loin.
Le projet de loi C-77 circonscrit l’application du système d’audiences sommaires aux cas de manquements d’ordre militaire et prévoit que toutes les infractions d’ordre militaire doivent être jugées par une cour martiale. Un manquement d’ordre militaire ne constitue pas une infraction à la LDN et n’entraîne pas l’ouverture d’un casier judiciaire (nouveaux art. 162.4 et 162.5 de la LDN). De plus, les droits des victimes dont il a été question précédemment ne trouvent pas application dans le système d’audiences sommaires.
Le nouvel article 162.6 de la LDN prévoit que quiconque ayant été jugé pour une infraction ne peut être jugé de nouveau pour un manquement d’ordre militaire découlant des mêmes faits, qu’il ait été déclaré coupable ou non de l’infraction, et ce, par une cour martiale, un tribunal civil ou un tribunal étranger. Cependant, si une audience sommaire a été tenue pour un manquement d’ordre militaire, la personne en cause peut quand même être jugée pour une infraction. Le nouveau paragraphe 162.6(3) de la LDN prévoit que les réponses ou les déclarations faites lors d’une audience sommaire ne peuvent pas être utilisées devant une juridiction disciplinaire, criminelle ou civile, sauf si l’audience ou la poursuite est fondée sur l’allégation selon laquelle la personne a fait des déclarations ou donné des réponses qu’elle savait être fausses.
Selon le nouvel article 162.95 de la LDN, si une accusation de manquement d’ordre militaire est déférée à un commandant, ce dernier doit, en tenant compte des conditions exposées à l’article 163 modifié (dont il sera question plus loin) :
S’il choisit de déférer l’accusation à un officier délégué, le commandant peut déléguer, dans la mesure où il le juge à propos, le pouvoir de tenir une audience sommaire à tout officier sous son commandement, sous réserve des règlements (nouvel art. 162.94 de la LDN). Le nouvel article 163.2 prévoit que le commandant supérieur, le commandant ou l’officier délégué à qui une accusation est déférée au titre du nouvel alinéa 162.95c) ou du nouvel article 163.2 de la LDN ont les trois mêmes options énumérées ci-dessus.
Le paragraphe 163(1) modifié énonce les quatre conditions qui doivent être remplies pour que le commandant supérieur, le commandant ou l’officier délégué puisse tenir une audience sommaire. Elles s’énoncent ainsi :
Cela étant dit, aux termes du nouveau paragraphe 163(2) de la LDN, un commandant supérieur, un commandant ou un officier délégué ne peut pas présider une audience sommaire si cette personne :
Le commandant supérieur, le commandant ou l’officier délégué peut toutefois tenir une telle audience si, compte tenu de toutes les circonstances, il n’est pas possible pour un autre commandant supérieur, commandant ou officier délégué de le faire.
S’il est décidé de ne pas donner suite à l’accusation par audience sommaire, l’exercice ultérieur d’une telle poursuite demeure possible (nouvel art. 163.3 de la LDN), pourvu qu’elle commence dans les six mois qui suivent la commission du manquement reproché (nouvel art. 163.4 de la LDN).
Le nouvel article 162.9 de la LDN énonce les objectifs de l’imposition de sanctions pour manquements d’ordre militaire, à savoir :
Les nouveaux articles 162.91 et 162.92 de la LDN établissent les principes à suivre pour décider de la sanction qu’il convient d’infliger pour un manquement d’ordre militaire :
Le nouvel article 162.93 précise qu’il peut également être tenu compte, dans la détermination de la sanction, des conséquences indirectes d’une décision portant que la personne a commis un manquement d’ordre militaire ou de la sanction qui en découle.
Le nouvel article 162.7 énonce les sanctions pouvant être infligées pour les manquements d’ordre militaire. Ils sont, en ordre décroissant de gravité :
À titre comparatif, à l’heure actuelle, les infractions d’ordre militaire faisant l’objet de procès sommaire peuvent être passibles d’une détention pouvant durer jusqu’à 30 jours si le procès est présidé par un commandant (nouveau par. 163(3) de la LDN).
La rétrogradation peut être infligée au personnel d’un grade supérieur à celui de sous-lieutenant, pour les officiers, et de soldat, pour les militaires du rang (nouveau par. 162.8(1) de la LDN) 59. Les règlements précisent à quel rang une personne peut être rétrogradée, bien qu’un officier commissionné ne puisse être rétrogradé que jusqu’au grade le plus bas qu’un tel officier peut détenir (nouveau par. 162.8(2) de la LDN).
Enfin, le type de sanction possible dépend du rang du décideur présidant l’audience sommaire (c.-à-d. commandant supérieur, commandant ou officier délégué) (nouvel art. 163.1).
Le projet de loi C-77 empêchant la tenue d’audiences sommaires pour des infractions d’ordre militaire, il s’ensuit une modification des règles applicables au renvoi des accusations pour des infractions d’ordre militaire et des manquements d’ordre militaire. Le nouvel article 161.1 de la LDN prévoit des processus de renvoi distincts (dont les modalités seront établies par règlement) pour les infractions d’ordre militaire et les manquements d’ordre militaire. Lorsqu’une personne est accusée d’une infraction d’ordre militaire, l’accusation doit être renvoyée au directeur des poursuites militaires (DPM) conformément au règlement, tandis que les accusations ayant trait aux manquements d’ordre militaire doivent être renvoyées à un commandant 60. Un commandant peut décider de ne pas donner suite à l’accusation ou de la renvoyer à un autre commandant, à un commandant supérieur ou à un officier délégué (nouvel art. 162.95 de la LDN).
L’article 26 du projet de loi remplace l’article 165.13 de la LDN, qui permettait au DPM de déférer une accusation pour qu’elle fasse l’objet d’un procès sommaire s’il était convaincu que la cour martiale ne devrait pas être saisie de l’accusation. Ce processus n’est plus nécessaire, puisque les infractions d’ordre militaire ne peuvent pas faire l’objet d’une audience sommaire. Le nouvel article 165.13 de la LDN prévoit plutôt que s’il décide que la cour martiale ne devrait pas être saisie de l’accusation, le DPM doit communiquer sa décision motivée par écrit à l’officier qui lui a déféré l’accusation ainsi qu’au commandant de l’accusé.
Le nouvel article 163.6 de la LDN établit le processus de révision de toute décision portant qu’une personne a commis un manquement d’ordre militaire rendue par un officier ayant tenu une audience sommaire et toute sanction infligée par lui. Le chef d’état-major de la défense ainsi que toute autre autorité militaire désignée par règlement (nouveau par. 163.6(1)) sont les autorités compétentes. L’autorité compétente peut procéder à cette révision d’office ou sur demande de la personne déclarée coupable du manquement d’ordre militaire (nouveau par. 163.6(2) de la LDN).
L’autorité compétente peut annuler intégralement ou partiellement toute décision rendue par l’officier qui a tenu l’audience sommaire (nouveau par. 163.7(1) de la LDN). Si la décision est annulée intégralement et qu’aucune autre décision n’a été rendue au cours de l’audience sommaire, toute sanction infligée est alors annulée et une nouvelle audience sommaire peut être tenue comme s’il n’y avait pas eu d’audience antérieure (nouveau par. 163.7(2) de la LDN). Dans le cas où l’annulation de la décision laisse subsister une ou plusieurs autres décisions portant que la personne a commis un manquement d’ordre militaire et où des sanctions infligées excèdent celles qui sont permises à l’égard de ces décisions ou sont, à son avis, indûment sévères, l’autorité ayant procédé à l’annulation peut y substituer la ou les nouvelles sanctions qu’elle juge indiquées (nouveau par. 163.7(3) de la LDN).
En outre, l’autorité compétente peut substituer une nouvelle décision à une décision portant qu’une personne a commis un manquement d’ordre militaire (nouveau par. 163.8(1) de la LDN). Si une décision annulée comportait une sanction excédant celle qui est permise à l’égard de la nouvelle décision ou est jugée indûment sévère par l’autorité compétente, celle-ci peut y substituer la sanction qu’elle juge indiquée (nouveau par. 163.8(2) de la LDN). La nouvelle sanction ne peut être supérieure, dans l’échelle des sanctions, à celle infligée en premier lieu (nouveau par. 163.9(2) de la LDN). L’autorité compétente peut commuer, mitiger ou remettre tout ou partie des sanctions infligées par l’officier ayant tenu une audience sommaire.
Aux termes de l’article 41 du projet de loi C-77, il n’est plus possible pour le gouverneur en conseil (dans le cas d’une déclaration de culpabilité par une cour martiale) ni pour le chef d’état-major de la Défense (dans le cas d’une déclaration de culpabilité à l’issue d’un procès sommaire) de réviser les verdicts de culpabilité et les peines prononcés par une cour martiale ou par une personne présidant un procès sommaire (art. 249 de la LDN). Toutefois, pour les affaires instruites par une cour martiale, la tenue d’un nouveau procès demeure possible, à condition que de nouveaux éléments de preuve aient été découverts.
L’article 47 du projet de loi modifie l’alinéa 423.1(1)b) du Code criminel aux fins d’étendre aux personnes associées au système de justice militaire l’application de l’infraction relative à l’intimidation d’une personne associée au système judiciaire.
L’article 66 du projet de loi C-77 prévoit que la LDN, dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de l’article 25 de ce projet de loi, s’applique aux poursuites contre une personne à qui il est reproché d’avoir commis une infraction d’ordre militaire entamées par une accusation portée avant l’entrée en vigueur des dispositions régissant les audiences sommaires dans la nouvelle section 5 de la LDN (art. 25 du projet de loi). L’article 67 du projet de loi empêche l’application rétroactive des nouveaux principes de détermination de la peine se rapportant à la reconnaissance des dommages causés à la victime ou à la collectivité.
* Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur. [ Retour au texte ]
© Bibliothèque du Parlement