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Le projet de loi C-12, Loi concernant la transparence et la responsabilité du Canada dans le cadre de ses efforts pour atteindre la carboneutralité en 2050 (titre abrégé : « Loi canadienne sur la responsabilité en matière de carboneutralité »), a été présenté à la Chambre des communes par le ministre de l’Environnement et du Changement climatique le 19 novembre 2020 1. Le projet de loi, après avoir été amendé par la Chambre des communes, a été adopté par les deux Chambres du Parlement. Il a ensuite reçu la sanction royale le 29 juin 2021.
Le projet de loi exige du gouvernement du Canada qu’il fixe des cibles nationales de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) et qu’il établisse le processus de planification, de production de rapports et d’évaluation en vue de l’atteinte de la carboneutralité d’ici 2050.
Les GES sont ainsi baptisés, car ils créent un « effet de serre » qui empêche une partie de la chaleur produite par le soleil de s’échapper de la Terre 2. Depuis l’époque industrielle, les activités humaines rejettent des quantités importantes de GES dans l’atmosphère, contribuant ainsi à un effet de serre toujours plus important.
L’homme, qui a sa part de responsabilité dans l’effet de serre, contribue au réchauffement de la planète. Selon les scientifiques, la tendance à la hausse qu’affichent les températures de la planète depuis le milieu du XXe siècle peut être attribuée à l’activité humaine 3.
Le réchauffement, d’une nature exceptionnelle, provoque le changement du climat, et, à son tour, la production moindre de neige et de glace, la montée du niveau de la mer, l’accroissement des phénomènes météorologiques extrêmes et l’augmentation de la désertification, pour ne nommer que ceux-là. Ces changements ont des conséquences, surtout néfastes, pour la vie sur la planète. Ils menacent notamment la santé, les moyens de subsistance, la sécurité alimentaire et l’approvisionnement en eau des êtres humains ainsi que la biodiversité et les écosystèmes 4.
La réduction des émissions de GES ou leur retrait de l’atmosphère ralentirait le réchauffement climatique et atténuerait quelques conséquences des changements climatiques.
En 2018, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat – un organe de l’Organisation des Nations Unies chargé d’analyser la science des changements climatiques – a publié un rapport sur les conséquences d’un réchauffement planétaire de 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels. Il a établi que, pour limiter le réchauffement à ce niveau d’ici 2100 et éviter les pires conséquences des changements climatiques, la carboneutralité doit être atteinte à l’échelle planétaire d’ici 2050 5.
Par « carboneutralité », on entend qu’un équilibre est atteint entre les émissions produites et les émissions retirées de l’atmosphère. La carboneutralité n’est pas synonyme de « zéro émission », terme selon lequel toutes les sources ramènent leurs émissions à zéro 6. Pour atteindre la carboneutralité, il faut émettre le moins de GES possible et compenser par le retrait d’une quantité égale de GES dans l’atmosphère 7.
Le gouvernement du Canada a répondu à l’appel de la réalisation de la carboneutralité d’ici 2050. Dans son discours du Trône de 2019, le gouvernement souscrit à l’objectif, et dans le discours du Trône de 2020, il a annoncé son intention de l’établir par voie législative 8.
La cible du Canada en matière de réduction des émissions de GES se fonde sur les objectifs de l’Accord de Paris, qui a été négocié par 196 pays dans le cadre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Les parties à l’Accord ont convenu, à long terme, de contenir la hausse de la température de la planète entre 1,5 et 2 °C. À cette fin, le Canada s’est engagé à réduire ses émissions de GES de 40 à 45 % par rapport aux niveaux de 2005 d’ici 2030 9. Le gouvernement du Canada a annoncé en avril 2021 cette nouvelle cible de réduction des émissions, révisant ainsi à la hausse la cible antérieure que le Canada s’était fixée en 2015.
En 2019, Environnement et Changement climatique Canada a estimé que le pays ne faisait pas assez de progrès pour être capable d’atteindre sa cible 10. Depuis, le gouvernement du Canada a adopté des mesures supplémentaires visant à réduire ses émissions de GES. En décembre 2020, il a déclaré que le pays était en voie de réduire de 32 à 40 % ses émissions de GES par rapport aux niveaux de 2005 d’ici 2030 11.
Le Canada s’est déjà donné, dans le passé, des objectifs de réduction de ses émissions, mais il ne les a pas atteints :
Dans le cadre de l’engagement que le Canada a pris aux termes de la CCNUCC, il doit produire des rapports sur sa réponse aux changements climatiques. Il doit soumettre les trois grands documents suivants :
Le Parlement du Canada a étudié d’autres propositions visant à établir des objectifs de réduction des émissions de GES et à assurer le suivi de l’intervention du gouvernement du Canada en réponse aux changements climatiques. Il s’agissait dans tous les cas de projets de loi émanant de députés, et non de projets de loi d’initiative ministérielle.
En ce qui concerne les provinces, aux termes des lois adoptées par la Colombie Britannique et le Manitoba, leur gouvernement respectif doit établir des cibles de réduction des émissions de GES et élaborer un plan pour les atteindre 23.
Plusieurs pays ont adopté des lois qui fixent des cibles de réduction des émissions ou qui obligent leur gouvernement à en fixer, et qui établissent un cadre pour assurer le suivi et l’évaluation des progrès accomplis par leur gouvernement.
Bon nombre de ces lois s’inspirent de la Climate Change Act 2008 (CCA) du Royaume-Uni, qui définit les obligations du gouvernement britannique dans la lutte contre les changements climatiques et précise les entités gouvernementales responsables de chacune 24.
La CCA établit une cible de réduction des émissions à long terme, soit la carboneutralité d’ici 2050, et engage le gouvernement britannique à fixer une série de « budgets carbone » quinquennaux, c’est-à-dire la quantité cumulative maximale de GES pouvant être émise au cours d’une période donnée.
Le gouvernement britannique peut modifier ses cibles et ses budgets, mais seulement après avoir consulté d’autres intervenants. Il doit présenter au Parlement du Royaume-Uni le plan au moyen duquel il compte atteindre la cible à long terme et respecter ses budgets carbone. Il doit également évaluer les risques associés aux répercussions des changements climatiques et élaborer des plans d’adaptation.
La CCA prévoit la mise sur pied d’un comité indépendant chargé de conseiller le gouvernement britannique sur son intervention en réponse aux changements climatiques. Le comité fait rapport au Parlement du Royaume-Uni sur les progrès réalisés par le gouvernement britannique. Bien que le gouvernement britannique soit tenu de donner suite à ces rapports, aucune sanction n’est prévue s’il n’atteint pas une cible de réduction des émissions.
Les pays ayant adopté des mesures législatives semblables à celles du Royaume-Uni comprennent la France, la Nouvelle-Zélande et la Suède 25.
Le projet de loi C-12 compte 29 articles. Ses principales dispositions sont présentées ci-dessous.
L’article 1 du projet de loi donne le titre abrégé du projet de loi C-12, Loi canadienne sur la responsabilité en matière de carboneutralité (la Loi).
Le projet de loi a pour objet d’exiger l’établissement de cibles nationales de réduction des émissions de GES et d’établir un processus de planification et d’évaluation des progrès que le gouvernement du Canada accomplit pour l’atteinte de ces cibles (art. 4).
Le projet de loi énonce une cible à long terme pour atteindre la carboneutralité d’ici 2050 et établit des « années jalons » pour les cibles intermédiaires. Les années jalons sont 2030, 2035, 2040 et 2045 (art. 2).
Un ministre fédéral est responsable de l’exécution de la plupart des tâches décrites dans le projet de loi C-12. Le projet de loi prévoit que ce ministre est le ministre de l’Environnement (art. 2), mais le gouverneur en conseil peut désigner n’importe quel ministre fédéral à cette fin (art. 5).
Aux termes du projet de loi C-12, le ministre doit établir les cibles nationales en matière d’émissions de GES et élaborer des plans pour atteindre ces cibles.
Le projet de loi précise que la cible nationale en matière d’émissions de GES pour 2050 est la carboneutralité (art. 6). La cible pour 2030 – qui correspond à la cible que le Canada s’est engagé à atteindre d’ici 2030 aux termes de l’Accord de Paris – constitue ce qu’on appelle la « contribution déterminée au niveau national » (par. 7(2)).
Le ministre doit également établir les cibles nationales en matière d’émissions de GES pour les années jalons. Ces cibles doivent être établies au moins 10 ans avant le début de l’année jalon visée (art. 7). Le projet de loi précise à quelle date, au plus tard, la cible doit être publiée (par. 7(4)).
Pour établir une cible en matière d’émissions de GES, le ministre doit tenir compte de quatre facteurs : des meilleures données scientifiques disponibles, des engagements internationaux du Canada par rapport aux changements climatiques, des connaissances autochtones ainsi que des observations de l’organisme consultatif constitué au titre de la Loi (art. 8).
Dans l’année qui suit l’établissement de chaque cible, le ministre doit publier une description générale des principales mesures qui permettront d’atteindre chaque cible (par. 7(5)).
Le ministre doit ensuite préparer des plans de réduction des émissions de GES pour atteindre chaque cible (par. 9(1)).
Le ministre doit établir le plan pour 2030 dans les six mois suivant la date d’entrée en vigueur de la Loi, une prolongation de 90 jours étant possible (par. 9(2) et 9(3)). Le plan doit comprendre « un objectif provisoire » de réduction des émissions pour 2026 (par. 9(2.1)). Les exigences relatives à la production de rapports sur l’objectif provisoire ne sont pas les mêmes que celles des années jalons.
Le ministre doit établir des plans subséquents au moins cinq ans avant le début de chaque année jalon et 2050 (par. 9(4)).
Le projet de loi précise l’information devant figurer dans chaque plan. Les plans doivent contenir la cible en matière d’émissions et décrire les principales mesures qui seront prises pour l’atteindre, y compris les stratégies sectorielles pertinentes et les stratégies visant la réduction des GES dans les activités fédérales. Les plans doivent aussi contenir le calendrier de mise en œuvre des mesures, des précisions et des projections sur les émissions de GES au Canada. Ils doivent fournir de l’information sur les mesures de collaboration avec d’autres gouvernements et expliquer comment les plans contribuent à l’atteinte de la carboneutralité d’ici 2050 (par. 10(1), 10(2) et 10(3)).
Le ministre peut modifier les cibles et les plans en matière de réduction des émissions, à condition que la modification soit compatible avec l’objet de la Loi (art. 11). Lorsqu’il établit ou modifie les cibles et les plans, le ministre doit permettre à d’autres parties de présenter des observations. Le gouvernement doit ensuite publier un rapport sur les observations reçues (art. 13).
Le projet de loi C-12 exige du gouvernement du Canada qu’il fasse rapport des progrès qu’il a accomplis dans le cadre de l’atteinte des cibles d’émissions de GES et qu’il évalue son rendement par rapport à chaque cible.
En consultation avec d’autres ministres, le ministre prépare un rapport d’étape au plus tard deux ans avant le début de chaque année jalon et avant l’année de la cible à long terme, soit 2050. Le rapport d’étape doit résumer les progrès réalisés en ce qui concerne la cible en matière d’émissions de GES pour l’année visée et contenir des renseignements sur les mesures que le gouvernement du Canada a prises ou pourrait prendre (art. 14).
Le ministre doit publier des rapports additionnels sur les progrès accomplis pour atteindre la cible de 2030. En plus de publier un rapport d’étape au plus tard deux ans avant le début de 2030 – c’est à dire avant la fin de 2027 – le ministre doit aussi publier des rapports d’étape avant la fin de 2023 et de 2025. Ces trois rapports constituent la description des progrès accomplis par le gouvernement pour l’atteinte de la cible provisoire en matière d’émissions de GES pour 2026 (par. 14(1.1), 14(1.2) et 14(3)).
Le ministre prépare en outre un rapport d’évaluation visant chaque année jalon et 2050. Le projet de loi exige que le rapport soit préparé au plus tard 30 jours après que le Canada a soumis son rapport d’inventaire national au CCNUCC. Le rapport d’évaluation résume les émissions de GES du Canada pour l’année visée, indique si le Canada a atteint sa cible en matière d’émissions et évalue les mesures que les différents ordres de gouvernement ont prises pour atteindre la cible ou pourraient prendre pour atteindre les cibles subséquentes (art. 15).
Si le Canada n’atteint pas sa cible d’émissions pour une année donnée, le rapport d’évaluation doit en expliquer les raisons et préciser comment le gouvernement du Canada compte atteindre la cible (art. 16).
Aux termes du projet de loi, les cibles, plans et rapports préparés par le ministre doivent être déposés devant chaque Chambre du Parlement et rendus publics, de même que toute modification apportée aux cibles, plans et rapports par le gouvernement du Canada (art. 17 à 19).
Le projet de loi C-12 constitue le Groupe consultatif pour la carboneutralité, un organisme consultatif chargé de conseiller le ministre et d’« effectuer des activités d’engagement » liées à l’atteinte de la carboneutralité d’ici 2050. Le ministre peut fixer et modifier le mandat de l’organisme (art. 20).
Le gouverneur en conseil nomme les membres de l’organisme consultatif sur recommandation du ministre, et fixe leur rémunération. Il nomme au plus 15 membres, qui exercent leurs fonctions à temps partiel pour un mandat renouvelable d’au plus trois ans (art. 21).
Pour faire des recommandations sur la composition de l’organisme consultatif, le ministre doit prendre en considération le fait que celui ci a besoin d’expertise et de connaissances dans les différents domaines que voici : la science des changements climatiques, les connaissances autochtones, d’autres sciences physiques ou sociales pertinentes, la politique des changements climatiques, l’offre et la demande énergétiques, et les technologies pertinentes (par. 21(1.1)).
L’organisme consultatif est chargé de présenter au ministre un rapport annuel sur ses conseils et ses activités. Le ministre doit publier ce rapport et répondre aux conseils qu’il contient (art. 22).
L’article 23 du projet de loi C-12 exige que le ministre des Finances prépare et rende public un rapport annuel sur les mesures que prend le gouvernement du Canada pour gérer les risques et occasions d’ordre financier liés aux changements climatiques. Cet article entre en vigueur à la date fixée par décret (art. 29). Les autres dispositions du projet de loi sont entrées en vigueur à la date de la sanction royale, soit le 29 juin 2021 26.
Selon le projet de loi, au moins une fois tous les cinq ans, le commissaire doit faire rapport de la mise en œuvre des mesures prises par le gouvernement du Canada pour atténuer les changements climatiques et atteindre ses cibles en matière d’émissions de GES. Les rapports du commissaire peuvent recommander des façons d’améliorer la mise en œuvre de l’approche adoptée par le gouvernement du Canada pour atténuer les changements climatiques (par. 24(1) et 24(2)). Le commissaire doit déposer son premier rapport au plus tard à la fin de 2024 (par. 24(4)).
Le projet de loi modifie la Loi sur le vérificateur général de manière à exiger que le commissaire produise ces rapports (art. 28).
La figure 1 illustre l’échéancier du processus de planification et de production de rapports établi par le projet de loi C‑12, tandis que la figure 2 présente le processus de production de rapports par le Groupe consultatif pour la carboneutralité, le ministre des Finances et le commissaire à l’environnement et au développement durable.
Note : Le projet de loi C-12 prévoit que les responsabilités décrites dans cette figure seront assumées par le ministre de l’Environnement (art. 2), mais le gouverneur en conseil peut désigner n’importe quel ministre fédéral à cette fin (art. 5). Cette figure a été mise à jour le 8 juillet 2021.
Source : Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement à partir d’informations tirées de Projet de loi C‑12, Loi concernant la transparence et la responsabilité du Canada dans le cadre de ses efforts pour atteindre la carboneutralité en 2050, 43e législature, 2e session (L.C. 2021, ch. 22).
Source : Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement à partir d’informations tirées de Projet de loi C‑12, Loi concernant la transparence et la responsabilité du Canada dans le cadre de ses efforts pour atteindre la carboneutralité en 2050, 43e législature, 2e session (L.C. 2021, ch. 22).
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