Il y a eu de nombreuses pandémies de grippe dans le monde à travers les siècles. Le XXe siècle en a connu trois; et il y en a eu une au tout début du XXIe siècle : la pandémie de grippe H1N1 de 2009. Bien qu’il existe plusieurs types et sous-types de virus grippal, seul le type A est à l’origine de pandémies dans la population humaine. Même si on ne peut prédire quand surviendra la prochaine pandémie de grippe, on peut toutefois déjà se préparer pour être en mesure de lutter efficacement contre cette pandémie lorsqu’elle se déclarera, afin d’en réduire les effets au minimum. C’est pourquoi l’Organisation mondiale de la Santé a élaboré des directives à l’intention de ses membres, pour la mise en œuvre de leurs plans de préparation. Au Canada, le dernier plan de préparation à la grippe remonte à 2018. Bien que l’Agence de la santé publique du Canada joue un rôle central dans le plan canadien de lutte contre la pandémie de grippe, la préparation demande une collaboration entre tous les ordres de gouvernement, tant à l’échelle nationale qu’internationale. Les enseignements tirés des interventions du Canada pour lutter contre la pandémie non grippale de COVID-19 et les changements subséquents dans l’infrastructure de préparation pandémique de l’Agence de la santé publique du Canada auront une incidence sur l’approche qu’adoptera le Canada pour faire face à la prochaine pandémie de grippe.
Le 11 juin 2009, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a déclaré la première pandémie mondiale de grippe depuis 1968. Le terme « pandémie » désigne l’apparition d’une maladie sous forme de flambées épidémiques dans des foyers multiples sur un vaste territoire. Même si la planète a connu une pandémie qui a commencé en 2020 et a été causée par un coronavirus (le SRAS-CoV-2), le présent document porte sur la pandémie de grippe. Il décrit les différents virus grippaux et les pandémies de grippe qui ont affligé l’humanité, et traite des plans de préparation de l’OMS et du Canada à la grippe pandémique.
La grippe est causée par des virus qui infectent les voies respiratoires des mammifères et des oiseaux. En comparaison avec la plupart des autres infections respiratoires virales, comme le rhume, l’infection grippale entraîne souvent une maladie plus grave dont les symptômes courants sont la fièvre, la toux, le mal de gorge, la congestion ou l’écoulement nasal, les maux de tête, les douleurs musculaires et, souvent, une fatigue extrême 1. La grippe intestinale n’est pas à proprement parler une grippe 2.
Les virus sont des organismes à part, qu’on ne peut vraiment ranger ni parmi les vivants ni parmi les non-vivants, quoiqu’ils soient généralement considérés comme des non-vivants 3. Ils contiennent du matériel génétique, mais ne peuvent se reproduire qu’en infectant un organisme, c’est-à-dire en s’attachant à une de ses cellules et en y injectant son propre matériel génétique. Le virus s’empare du mécanisme de reproduction de la cellule hôte et s’en sert pour produire des copies multiples des diverses composantes virales, qui se reconstituent sous forme de virus complets; ceux ci quittent alors la cellule pour aller en infecter d’autres 4.
Le matériel génétique du virus de la grippe est constitué d’ARN (acide ribonucléique), et non d’ADN (acide désoxyribonucléique, que l’on retrouve chez toutes les autres formes de vie). Le virus se subdivise en types A, B, C et D, selon les différences présentées par ses protéines. Seuls les types A et B peuvent infecter l’humain et provoquer de graves maladies pouvant entraîner la mort. Seuls les virus de la grippe de type A sont à l’origine de pandémies 5.
Les virus de la grippe de type A se subdivisent en plusieurs sous types, selon les différences observées dans les protéines se trouvant sur la surface externe du virus. Ces protéines de surface constituent la cible principale de la réponse immunitaire. Les sous types sont nommés en fonction des deux protéines de surface qui varient d’un sous type à l’autre : « H » désigne l’hémagglutinine et « N », la neuraminidase. On ne connaît pas de sous type au virus grippal B.
Lorsque l’être humain est exposé à un virus de la grippe, sa réponse immunitaire consiste à produire des anticorps qui ciblent les protéines de surface. Si la réponse est efficace, le virus est éliminé de l’organisme. Pour survivre, le virus doit éviter de se faire détruire par les anticorps. Il y parvient au moyen de deux mécanismes de mutation qui provoquent la modification des protéines de surface. Un type de mutation, appelé « glissement antigénique », entraîne une très légère variation des protéines de surface; souvent, ces changements n’ont aucun effet sur la réponse immunitaire. Ce type de mutation est suffisamment lent pour que les vaccins saisonniers offrent une certaine protection contre la maladie. Par contre, le deuxième type de mutation, appelé « cassure antigénique », provoque des changements importants dans les protéines virales, et peut aussi survenir lorsqu’un virus infecte une autre espèce. Cette forme de mutation ne concerne que les virus grippaux de type A; c’est elle qui risque le plus d’entraîner des pandémies de grippe chez l’humain 6.
Il y a eu plusieurs pandémies de grippe à travers les siècles. Avec l’augmentation de la densité de population et la multiplication des voyages dans le monde, les infections virales se sont propagées plus loin et plus vite. Il y a eu trois pandémies grippales au XXe siècle, et la dernière remonte à 2009. Ces pandémies sont résumées dans le tableau 1 ci-après.
La dernière pandémie de grippe, qui date de 2009, s’est déclarée lorsqu’une nouvelle souche du sous type H1N1, d’origine porcine, a été détectée chez deux enfants en Californie. Le virus présentait une séquence génétique particulière qui lui a permis de se propager facilement d’une personne à l’autre et de provoquer des troubles de santé importants. Le virus H1N1 s’est répandu rapidement dans le monde. À la fin du mois de juin 2009, dans les deux semaines suivant l’annonce de l’OMS selon laquelle il s’agissait d’une pandémie mondiale de grippe – la première pandémie du XXIe siècle –, on avait confirmé plus de 77 000 cas dans 116 pays. Au Canada, ce sont 7 983 cas de grippe H1N1 qui avaient été confirmés; entraînant 538 hospitalisations et 25 décès 7.
Pandémie/Épidémie | Virus responsable | Infections/Décès | Populations les plus touchées |
---|---|---|---|
Pandémie de grippe de 1918 à 1920 | Virus de la grippe de type A, sous‑type H1N1 | Estimation de 500 millions de personnes infectées, 50 à 100 millions de morts | Enfants et jeunes adultes |
Pandémie de grippe de 1957 à 1958 | Virus de la grippe de type A, sous‑type H2N2 | 1,1 million de morts | Enfants |
Pandémie de grippe de 1968 à 1969 | Virus de la grippe de type A, sous‑type H3N2 | 1 million de morts | Enfants et jeunes adultes |
Pandémie de grippe de 2009 à 2010 | Virus de la grippe de type A, sous‑type H1N1 (A(H1N1)pdm09) | 200 millions de personnes infectées, 200 000 morts | Adolescents et jeunes adultes |
Sources: Tableau préparé par la Bibliothèque du Parlement à partir de données tirées de N.J. Cox et K. Subbarao, « Global Epidemiology of Influenza: Past and Present », Annual Review of Medicine, vol. 51, 2000, p. 412 et 413; et « Table 1 – A summary of transmission of CoVs and IAVs », dans Chao Jiang et al., « Comparative review of respiratory diseases caused by coronaviruses and influenza A viruses during epidemic season (1,30 Mo, 10 pages) », Microbes and Infection, vol. 22, 2020, p. 239.
Le Système mondial de surveillance de la grippe et de riposte (GISRS) de l’OMS est utilisé afin d’aider l’OMS à recommander la composition du vaccin contre la grippe pour la prochaine saison grippale. Il sert également de mécanisme mondial d’alerte en cas d’apparition de virus grippaux susceptibles de causer une pandémie. Le système, créé en 1952, a favorisé la mise en place d’un réseau de laboratoires permettant à l’OMS d’offrir :
Le GISRS de l’OMS fait appel aux :
Les données sur la surveillance sont téléchargées dans la base de données de surveillance de l’OMS, FluNet, par les centres et laboratoires participants énumérés ci-dessus. FluNet est utilisée pour suivre la propagation des virus de la grippe dans le monde 9. Le GISRS et FluNet suivent à la fois la grippe saisonnière et la grippe pandémique.
En 2019, l’OMS a publié sa Stratégie mondiale de lutte contre la grippe, qui vise à renforcer le contrôle de la grippe saisonnière dans le monde, à réduire la transmission des virus de la grippe des animaux aux humains et à améliorer la préparation à la grippe pandémique 10. L’OMS a publié ses premières directives propres à la grippe pandémique en 1999 11, et il y a eu un certain nombre de mises à jour et de révisions de ces directives depuis. La directive la plus récente de l’OMS, intitulée Gestion des risques de pandémie de grippe : Guide de l’OMS pour prise de décisions éclairées et harmonisation, à l’échelle nationale et internationale, de la préparation et la réponse en cas de grippe pandémique, date de 2017 12. Le guide avait été révisé en 2013 pour tenir compte des enseignements tirés de la pandémie de grippe H1N1 de 2009. Il utilise une approche pansociale qui reconnaît les rôles des différents intervenants – gouvernements nationaux, secteurs de la santé, secteurs non liés à la santé et personnes – pour atténuer les effets d’une éventuelle pandémie. Le guide décrit le rôle du Règlement sanitaire international, recense les phases de pandémie qui se chevauchent et traite de la production de vaccins. En outre, il est destiné à être utilisé conjointement avec le Cadre de préparation en cas de grippe pandémique.
Ce cadre, que supervise l’Assemblée mondiale de la Santé, a été publié pour la première fois en 2011, et une deuxième édition est parue en 2021 13. Il s’agit d’un « instrument de santé publique qui réunit les États membres, l’industrie, d’autres intervenants et l’OMS pour mettre en œuvre une approche mondiale dans la préparation et la réponse en cas de grippe pandémique 14 ». Il demande une collaboration entre les États membres, pour mettre en commun dans le GISRS le matériel biologique et les renseignements concernant les virus ayant un potentiel pandémique, et dans le cadre de la contribution de partenariat, la contribution des fabricants de vaccins, de médicaments et de matériel de diagnostic, pour améliorer la préparation en cas de grippe pandémique et pour donner un accès plus équitable aux États membres qui ont besoin de vaccins et de médicaments utilisés en cas de pandémie 15.
Les phases d’une pandémie de grippe définies par l’OMS pour guider les États membres sont résumées dans la figure 1 ci-dessous.
Source : Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement à partir d’information tirée de Organisation mondiale de la Santé, Global Influenza Programme, Gestion des risques de pandémie de grippe : Guide de l’OMS pour prise de décisions éclairées et harmonisation, à l’échelle nationale et internationale, de la préparation et la réponse en cas de grippe pandémique (1,11 Mo, 63 pages), 2017, p. 12 et 13.
Le Plan canadien de lutte contre la pandémie d’influenza dans le secteur de la santé, qui se veut un document évolutif, a d’abord été publié en 2004, puis mis à jour par le Réseau pancanadien de santé publique en 2006. Il a été mis en œuvre durant la pandémie de grippe H1N1 de 2009. Un examen interne de la réponse à cette pandémie a permis de conclure que les mesures prises ont donné globalement de bons résultats et que la planification avait permis de réduire efficacement l’impact du virus. Toutefois, le rapport recommandait d’améliorer la capacité d’appoint, car les infrastructures du Canada auraient pu être submergées si le virus H1N1 avait été plus infectieux ou s’il avait rendu plus de gens malades. Le rapport recommandait également d’améliorer les communications scientifiques de Santé Canada et de l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) 16.
En 2018, le document a été remplacé par Préparation du Canada en cas de grippe pandémique : Guide de planification pour le secteur de la santé (PCCGP) qui tient compte dans cette nouvelle version des leçons à retenir de la pandémie de grippe de 2009 17.
Le Plan de PCCGP repose sur les principes de base de la santé publique et de l’intervention en cas d’urgence, et il suit une approche pansociale. Il a pour objectif de réduire le nombre de cas de maladie et de décès ainsi que les perturbations sociales, ce qui exige la collaboration des différents ordres de gouvernement et la coordination de leurs activités.
Le Plan de PCCGP utilise les phases de l’OMS décrites ci dessus uniquement à titre indicatif pour déterminer les déclencheurs de mesures d’intervention. Le Plan de PCCGP dit :
L’intervention du Canada pour lutter contre le nouveau virus ou virus pandémique dépendra de la présence et des niveaux d’activité du virus dans le pays, qui ne correspondront pas forcément à la situation mondiale. Par conséquent, les phases mondiales définies par l’OMS ne seront pas utilisées pour décrire la situation au Canada et ne serviront pas non plus d’éléments déclencheurs d’intervention dans les [provinces et territoires canadiens] 18.
Les éléments déclencheurs d’intervention décrits dans le Plan de PCCGP sont résumés dans le tableau 2.
Éléments déclencheurs | Interventions | Remarques |
---|---|---|
Nouveau virus de la grippe détecté quelque part dans le monde, mais dont la transmission est limitée ou nulle |
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Les communications sur mesure destinées au secteur de la santé et au grand public se poursuivent tout au long de l’intervention pour lutter contre la pandémie |
Transmission soutenue d’un nouveau virus de la grippe détecté quelque part dans le monde |
|
La pandémie peut être imminente ou avoir déjà commencé |
Nouveau virus de la grippe présentant une transmission soutenue ailleurs détecté pour la première fois au Canada |
|
Selon les circonstances, l’activation des protocoles d’urgence sanitaire peut déjà avoir eu lieu |
Propagation d’un nouveau virus pandémique dans une province, un territoire ou une localité |
|
Les niveaux d’activité augmenteront ou diminueront en fonction des taux d’infection |
Propagation de l’infection grippale exerçant une tension sur la capacité à fournir des services |
|
Il est possible que ce niveau ne soit jamais atteint dans l’ensemble des provinces et territoires |
Ralentissement du taux d’infection grippale et diminution de la demande de services |
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Sans objet |
Disponibilité du vaccin antigrippal |
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Sans objet |
Arrivée de la deuxième vague d’infection grippale ou de la vague suivante |
|
Sans objet |
Fin de la pandémie grippale |
|
Intégrer les leçons apprises durant la pandémie dans les prochains plans de préparation à une pandémie |
Source: Tableau préparé par la Bibliothèque du Parlement à partir d’information tirée de Réseau pancanadien de santé publique, « Tableau 2 – Éléments déclencheurs en cas de pandémie et interventions généralement associées », Préparation du Canada en cas de grippe pandémique : Guide de planification pour le secteur de la santé (2,64 Mo, 73 pages), 2018, p. 42 à 44.
Le Plan de PCCGP traite également des éléments de la préparation et de l’intervention en cas de grippe pandémique dont il est question dans le tableau 2. Le tableau 3 résume ces éléments, dont les détails supplémentaires se trouvent dans des annexes distinctes du Plan de PCCGP 19.
Éléments | Objectifs | Remarques |
---|---|---|
Surveillance | Surveiller l’étendue géographique des cas, les taux d’infection et les tendances ainsi que les répercussions de la pandémie (cas, hospitalisations, décès, pressions sur le système de santé, modifications du virus de la grippe en question) | Permet de fournir les renseignements nécessaires pour prendre des décisions opportunes sur les stratégies d’intervention |
Services de laboratoire | Détecter les premiers cas de grippe, fournir des données sur les infections et les caractéristiques de la souche virale nécessaires pour les activités de surveillance | Sont nécessaires pour détecter un nouveau virus de la grippe, développer et mettre en œuvre des tests diagnostiques pour suivre l’activité virale tout au long de la pandémie |
Mesures de santé publique | Réduire le taux d’infection au virus et alléger le fardeau pesant sur le système de santé en attendant la mise à disposition d’un vaccin | Incluent les interventions non pharmaceutiques, y compris le port du masque, les interactions sociales et les restrictions de voyage |
Vaccination | Prévenir la maladie et, en fin de compte, la propagation des infections grippales pour mettre fin à la pandémie | La stratégie canadienne en matière de vaccins contre la pandémie vise à attribuer, à distribuer et à administrer les vaccins autorisés et à en surveiller l’innocuité et l’efficacité |
Traitements antiviraux | Traiter les personnes infectées et prévenir la maladie chez les personnes exposées au virus de la grippe | Ce sont les seuls traitements médicamenteux propres à la grippe disponibles; ils peuvent être utilisés avant que les vaccins ne soient disponibles |
Prévention et contrôle des infections, et santé au travail | Prévenir l’exposition à la grippe pandémique et sa transmission pendant la prestation de soins de santé | Requièrent la collaboration des responsables des programmes de santé au travail et des programmes de prévention et de contrôle des infections |
Services de soins de santé | Maintenir des niveaux acceptables de services pour tous les patients durant les flambées des cas de grippe | Nécessitent l’adoption d’approches innovantes, notamment le triage, les soins virtuels et par téléphone, ainsi que les ressources en ligne |
Lignes directrices de soins cliniques | S’assurer que tous les praticiens reçoivent les directives nécessaires et à jour sur les soins aux patients atteints de grippe pandémique | Les patients peuvent présenter toute une série de symptômes |
Communications | Fournir des renseignements cohérents et faciles à comprendre sur le virus, la maladie et sa propagation | Des communications ouvertes et transparentes sont essentielles pour optimiser le respect des mesures de santé publique par la population |
Recherche | Mettre au point des traitements et des vaccins efficaces, et suivre l’évolution du virus | La recherche doit également se poursuivre entre les pandémies |
Source: Tableau préparé par la Bibliothèque du Parlement à partir d’information tirée de Réseau pancanadien de santé publique, « 4.0 – Principaux éléments de la préparation et de l’intervention en cas de grippe pandémique », Préparation du Canada en cas de grippe pandémique : Guide de planification pour le secteur de la santé (2,64 Mo, 73 pages), 2018, p. 45 à 62.
En vertu de la Constitution, la santé et les soins de santé sont des responsabilités partagées entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux 20. À ce titre, tous les ordres de gouvernement ont un rôle à jouer lors des urgences de santé publique, et cela inclut les pandémies. Le gouvernement fédéral joue un rôle essentiel en collaborant avec les gouvernements provinciaux et territoriaux et en s’associant aux efforts internationaux pour optimiser l’efficacité de l’intervention en cas de pandémie. De plus, il doit s’assurer que tous les ministères fédéraux ont mis en œuvre des plans d’urgence et que les frontières internationales sont protégées afin de minimiser l’introduction de maladies infectieuses au pays 21.
Le rôle du gouvernement fédéral dans le Plan de PCCGP est principalement assumé par l’ASPC. Le Centre de mesures et d’interventions d’urgence (CMIU) de l’ASPC et son Centre des opérations du portefeuille de la Santé assurent la coordination avec les ministères fédéraux, les autres ordres de gouvernement et les autres intervenants dans le cadre du Plan d’intervention fédéral-provincial-territorial en matière de santé publique dans les cas d’incidents biologiques afin de fournir des services de gestion des urgences 22.
La surveillance nationale de la grippe et de syndromes grippaux (SG) est effectuée par l’ASPC dans le cadre de son programme Surveillance de l’influenza, qui sert à recueillir des données grâce à un réseau regroupant des laboratoires, des hôpitaux, des cabinets de médecins, ainsi que les ministères et agences de la Santé des provinces et des territoires. Les rapports de Surveillance de l’influenza sont publiés chaque semaine pendant toute l’année. Le programme Surveillance de l’influenza présente les sept volets que voici de la surveillance de la grippe au Canada :
Le CMIU de l’ASPC assure le fonctionnement du Réseau mondial d’information en santé publique (RMISP), système d’alerte rapide sécurisé sur le Web qui a pour but de recueillir en permanence et en temps réel des renseignements préliminaires concernant la santé publique, grâce à la surveillance des médias du monde entier. Les avis d’événements qui peuvent avoir de sérieuses conséquences pour la santé publique sont transmis aux usagers inscrits, comme les autorités gouvernementales, les organisations non gouvernementales de santé publique et d’autres intervenants. Ce système, qui n’est pas limité à la grippe, peut inclure d’autres maladies infectieuses, la contamination de la nourriture et de l’eau, le bioterrorisme et l’exposition aux agents chimiques et radionucléaires, ainsi que les catastrophes naturelles 24.
L’efficacité du RMISP pour détecter la nouvelle menace représentée par la COVID-19 à la fin de 2019 et au début de 2020 a été critiquée. Des reportages dans les médias datant de l’été 2020 laissaient entendre que des changements au sein de l’ASPC avaient entraîné une diminution de la surveillance à l’échelle internationale et l’incapacité du RMISP à lancer des alertes internationales 25. Un rapport de mars 2021 de la vérificatrice générale du Canada sur l’état de préparation du Canada en cas de pandémie a fait état de l’incapacité du RMISP à diffuser des alertes rapides au sujet de la COVID-19 26.
Le 17 août 2020, la ministre de la Santé a mis sur pied un comité indépendant pour examiner le RMISP. Cet examen a porté sur la contribution du RMISP à l’information en santé publique à l’échelle nationale et internationale, notamment le rôle du Réseau dans la réponse rapide de l’ASPC à la COVID-19, son efficacité actuelle et son rôle futur dans la surveillance de la santé publique fondée sur les événements. Le rapport final de l’examen, publié en juillet 2021, contient de nombreuses recommandations concernant le mandat, la vision, la gouvernance, les partenariats, ainsi que les rôles et les responsabilités du RMISP. Il souligne également le fait que la détection des signaux d’alerte précoce et la diffusion d’alertes doivent rester des fonctions essentielles du RMISP 27.
Par ailleurs, le CMIU de l’ASPC finance et tient une Réserve nationale stratégique d’urgence (RNSU), qui comprend un dépôt central à Ottawa et d’autres entrepôts situés dans les différentes régions du Canada. La RNSU permet d’approvisionner en urgence les provinces et les territoires, habituellement dans les 24 heures. La RNSU contient des fournitures pour hôpitaux, comme des lits, des couvertures, de l’équipement pour les hôpitaux et de l’équipement de protection individuelle (EPI), des instruments médicaux et des produits pharmaceutiques, comme des antibiotiques et des antiviraux, de même que des mini-cliniques, qui font partie des collections de fournitures de la RNSU pouvant être déployées pour le triage et pour réduire la pression sur les services médicaux locaux, et qui peuvent être installées dans des immeubles existants comme des écoles et des centres communautaires 28.
Des stocks d’antiviraux sont conservés dans la RNSU et dans la Réserve nationale d’antiviraux créée en 2004 et gérée par les provinces et les territoires 29. Les vaccins ne peuvent pas être stockés, parce qu’ils peuvent être produits seulement après qu’une nouvelle souche de virus est en circulation et a été détectée. Le Canada a conclu un contrat de 10 ans avec GlaxoSmithKline en 2011 30 pour avoir suffisamment de vaccins pour toute la population canadienne en cas de pandémie de grippe 31. En mai 2021, la vérificatrice générale du Canada a publié un rapport sur la RNSU de l’ASPC. Le rapport dit qu’il y avait des problèmes de longue date qui n’avaient pas été résolus au début de la pandémie de COVID 19. De ce fait, l’ASPC n’était pas préparée pour répondre à la demande élevée d’EPI et d’instruments médicaux venant des provinces et des territoires. On reconnaît toutefois dans le rapport que l’ASPC a pris des mesures pour améliorer « sa façon d’évaluer les besoins et d’acheter, d’attribuer et de distribuer l’équipement 32 ».
En décembre 2021, l’ASPC a publié son rapport annuel intitulé Une vision pour transformer le système de santé publique au Canada. Le rapport fait état d’un certain nombre d’observations concernant les changements nécessaires pour mieux préparer les infrastructures canadiennes de santé publique aux prochaines pandémies, notamment des améliorations dans la collecte et la mise en commun de données sur la santé, une plus grande collaboration entre tous les ordres de gouvernement et les groupes d’intervenants au Canada, la mise à jour des systèmes de surveillance, une approche équitable dans la réponse à la pandémie et une plus grande capacité d’appoint dans les hôpitaux et les autres ressources de santé 33.
Les plans de lutte contre les pandémies de grippe ont été mis à jour au Canada et ailleurs dans le monde après la pandémie de H1N1 de 2009. Les interventions du Canada au début de la pandémie non grippale de COVID-19 ont révélé certaines lacunes dans les plans de préparation en cas de menaces pour la santé publique que le gouvernement du Canada a commencé à corriger.
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